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  • Auguste Bleton

    « Je fais simplement partie de ces promeneurs errants que parfois l’on rencontre  - surtout dans nos anciens quartiers – et qui s’en vont, laissant vaguer leurs pas et trotter leur imagination, admirant la vieille cité jusque dans ses verrues et vivant, pour une heure, dans un passé qu’ils évoquent avec plaisir.

    A  ceux qui auraient le goût de ces excursions mais qui hésitent à les accomplir seuls ; à ceux qui, les ayant faites, ne seraient pas fâchés de savoir ce que pense un autre et de relever dans ses dires quelque erreur ou quelque énormité, j’offre de cheminer ensemble à travers Lyon. Nos voyages ne seront ni longs ni dangereux, et d’ailleurs, Monsieur ou Madame, il ne tiendra qu’à vous de m’abandonner en route, pour peu que mes racontars vous soient à charge. »

     

    Ces propos, signés du pseudonyme de Monsieur Josse, auraient pu servir de préambule à ce blogue lui-même, tant son auteur s’y retrouve. C’est à Pierre-Auguste BLETON (1834-1911), lyonnais de bonne mémoire à qui a été attribuée une partie de l'ex-rue Deschazelles, sur le plateau de la Croix-Rousse,  qu’il convient pourtant de les rendre.

    Pierre-Auguste Bletonn joailler de formation, s'illustra dans la belle profession de rédacteur au Courrier de Lyon, à partir de 1884, puis  à Lyon Républicain en 1888. Il fut connu en France comme membre du conseil supérieur de la Mutualité. En 1885, il est devenu membre de l'Académie du Gourguillon, sous le pseudonyme évocateur et par lui choisi de Mami Duplateau. Il a laissé de nombreux ouvrages intéressant l'histoire lyonnaise :


    - Petite histoire populaire lyonnaise, Palud, 1885
    - Le peintre Gaspard Poncet, Storck, 1894
    -Tableau de Lyon avant 1789, Storck, 1894
    - Lyon pittoresque, illustrations de Drevet, Bernoux & Cumin, 1896
    - L'Ancienne Fabrique de soierie, Storck, 1897


    Enfin, sous  le pseudonyme de Monsieur Josse, pseudonyme que l’auteur de ce blog  ainsi que quelques-uns de ses amis, affectionne particulièrement, il a écrit deux ouvrages remarquables,  dans un genre qui faisait flores à la fin du dix-neuvième siècle : la promenade documentaire, archéologique & pittoresque à travers les rues ; monsieur Josse appelait ceci faire ses tournées hebdomadaires, en effet, ces errances digestives et de haute tenue tant morales qu'intellectuelles, étaient essentiellement dominicales. On ne dira jamais assez à quel point Lyon est une ville faite pour la marche. Voici donc le nom de ces deux ouvrages que la maison conseille vivement à tous ses visiteurs, cela va sans dire :


    - A Travers Lyon, illustrations de Drevet, Dizain & Richard, 1889
    - Aux environs de Lyon, Dizain et Richard, 1892

     

     

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    Page de titre gravée par Joannès Drevet (1854-1940) dans Auguste Bleton, Lyon pittoresque, avec une préface de M. Coste-Labaume, Lyon, Bernoux et Cumin, 1896, illustré de 5 eaux-fortes, 20 lithographies et 300 dessins à la plume par Joannès Drevet. (Collection Bibliothèque municipale de Lyon, Rés 156436.)

  • Rue de la République

    De 1853 jusqu’en 1864, le département du Rhône eut pour maire et préfet Claude-Marius Vaisse, un serviteur zélé de Napoléon III, qui, « dans l’espoir de faire aimer la dictature, avait, dès son arrivée à Lyon, dressé un plan de travaux pour améliorer la circulation urbaine et faire pénétrer l’air et la lumière dans les quartiers sombres et humides du centre », écrit l’historien Kleinclausz[1]. Le fleuron de ces travaux fut sans conteste le percement de la rue Impériale, reconvertie, par la suite en rue de la République, large avenue «dont les beaux candélabres, les cafés somptueux, la fontaine aux eaux jaillissantes donnèrent aux bourgeois d’alors l’impression d’en finir enfin avec la vieille cité médiévale aux rues populaires, tortueuses et mal éclairées

    Ce point de vue rétrospectif, qui est celui de l’historien, est contesté par la vox populi, si l’on en croit ce témoignage du romancier  Henri Béraud, qui fut, dans son enfance, le témoin fasciné de l’ampleur de ces travaux :

    « Un quartier en démolition, ah ! mais tout un quartier, une entière paroisse, grande comme un chef-lieu de canton. Il n’en restait qu’un vaste éboulis. (…) Peu à peu, des maisons neuves s’alignaient sur les beaux vestiges du quartier Grolée. Il en résulta une avenue si large et si claire que les Lyonnais ne se décidèrent jamais à y passer ».[2]

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    Lyon modernisée ? Lyon vandalisée ? Le débat fit rage, opposants les tenants de la modernité hygiéniste aux vieux érudits du « Lyon de nos pères » Le préfet Vaisse fut accusé de construire ces larges avenues dans le but d’en finir avec les vieilles ruelles en zigzags, promptes à se changer en barricades. On l’accusa aussi d’aller contre le mouvement du soleil, en bâtissant sa rue de nord en sud,  et non pas d’est en ouest, et de fait, sa rue Impériale, même devenue rue de la République, est rarement inondée de soleil : de quoi donner raison aux nostalgiques de l’ancien Lyon, qui l’avait pronostiqué dès 1852 :

    «Et on appelle tout ce tumulte d’alignements inconnus, tous ces changements de décoration à vue, embellissement, assainissement, magnificence. Oui, l’air et la lumière inonderont la rue Impériale ; mais, dans nos villes méridionales, les rues larges offrent l’inconvénient d’être exposées sans défense aux bourrasques de l’arrière-saison et aux ardents soleils du soleil d’été. Ces grandes voies droites sont commodes, belles même, mais monotones et froides. Et à quel prix les obtenons-nous, au prix du caractère historique de la cité, des ses mœurs conservées, de son type, de son esprit public, de sa nationalité. Oui, encore un coup, la civilisation croulera à pleins bords dans cette rue ; mais je crains bien, moi, que la barbarie ne trouve, pour envahir la métropole lyonnaise, les mêmes facilités que la civilisation ; je crains bien que le charlatanisme, la rouerie, l’égoïsme de Paris ne fassent plus vite irruption, et n’achèvent de ruiner la physionomie locale »[3]


    Avec le temps, ces premières réticences se sont éclipsées et la rue de la Ré s’est installée dans le cœur des gens. Voici un beau témoignage de Jean Reverzy, tout imprégné des années cinquante :

    « A l’époque que nous évoquons, la jeunesse triste et humblement vêtue avait pris l’habitude d’arpenter la rue de la République à la fin de l’après-midi, les mains aux poches et un cahier de cours sous le bras. Nous allions par petits groupes, coude à coude, en causant à voix basse. La promenade sans but, d’un bout à l’autre de la rue, refaite dix fois, durait jusqu’au soir. Chaque visage rencontré était familier ; nous levions parfois les yeux sur une jeune fille, sans aller jusqu’à lui sourire : telles furent nos amours enfantines, dans un monde qui semblait et mourir d’ennui et de silence : cela s’appelait faire la rue de la Ré »[4]

     

    Faire la Rue de la Ré, ces mots-là, tous les Lyonnais les ont prononcés un jour. Pour y accéder, on prenait donc sa ligne O.T.L. (Office des transports lyonnais), le samedi après midi et l’on appelait cela « aller en ville » : aux Terreaux, par exemple, ou bien à Bellecour. Ou encore aux Cordeliers. Dans tous les cas, on faisait la rue de la Ré, véritable entreprise, dans un territoire conçu pour monsieur et pour madame, pour chacun et pour chacune : la presqu’île, dont la République et le monument érigé à son président assassiné était le centre, et dont la rue de la Ré était le nerf, a vraiment connu son heure de gloire dans les années cinquante/soixante. Durant la période dite « des fêtes », c’est-à-dire du huit décembre (qui ne durait alors qu’une soirée) à la Saint-Sylvestre, on s’y traînait en famille parmi des odeurs de brioches et de marrons chauds, dans la cohue de ses trottoirs parsemés de sapins enguirlandés, et les klaxons de sa chaussée qu’empruntaient les trolleys de la ligne 7 : Walt Disney était à l’affiche du Cinéjournal, John Wayne à celle du Majestic, Ben-Hur et Scarlett O’Hara à celle du Pathé : un véritable centre ville dans lequel le Pathé et le Progrès (aujourd’hui la Fnac), les brasseries (bar Américain, Tonneau, la Paix…), les sièges opulents des banques, les commerces et les grands magasins (Aux deux passages) distillaient savamment des ambiances citadines inoubliables.

    Depuis 1975, Avec la construction du centre commercial de la Part-Dieu, la Rue de la Ré a perdu ce caractère de centre ville exclusif. La construction, dans la foulée, du métro l’a rendue piétonne : Il est certain qu’à présent, entre la Fnac et les enseignes de restauration rapide, la Rue de la Ré, comme d’ailleurs beaucoup d’artères centrales de nos grandes villes, n’offre aux chalands cette poésie urbaine dont le texte de Reverzy se faisait écho. C’est une artère de consommation, de distribution.

    A l’image de la République, finalement…



    [1] Histoire de Lyon, tome III, librairie Pierre Masson, Lyon 1952

    [2] La Gerbe d’Or, Henri Béraud

    [3] Joseph Bard, « Bulletin d’archéologie locale » de la Revue du Lyonnais, 1852

    [4] A la Recherche d’un miroir Jean Reverzy, , Julliard, 1962,  réed. Flammarion 1001 pages, 2002

  • Cuvier

    "Le Napoléon de l'Intelligence" (rien de moins !): Ainsi le nomma Jean Viennot, en 1932.

    Avant lui, Balzac lui-même s'était interrogé : "Cuvier n'est-il pas le plus grand poète de notre siècle ?" Bon, par conséquent Viennot ne fait en disant cela qu'imiter Balzac, dont on sait bien qu’il voyait des Napoléon partout (le Napoléon de la pharmacie, de la finance, du journalisme...) et qu’il avait l'hyperbole facile. Tout de même, tout de même... Le compliment a dû toucher Cuvier au cœur, Cuvier qui trône en chair de bronze en plein centre de sa ville natale, Montbéliard, juste en face du célèbre temple protestant. C'est dans cette ville-là qu'il passa les quinze premières années de sa vie. Et on imagine ce que pouvait être Montbéliard, de 1769 à 1784 ! Pas très gai, ni très animé… Comme les heures y sont lentes, la lecture d'un ouvrage de Buffon, trouvé par hasard dans la bibliothèque d'un de ses parents, l'égaye un peu. Cela éveille en lui le goût de l'histoire naturelle : une véritable vocation. Dès lors le jeune Cuvier part faire ses études à Stuttgart. Il devint ensuite précepteur à Caen, puis Fécamp, auprès de la famille Héricy en 1788.

    12495-004-060206B7.jpgC'est durant cet épisode qu'il entra en contact avec les naturalistes du Musée d'Histoire naturelle de Paris, en tant que suppléant à la chaire d'Anatomie où il effectua ses premiers pas en 1795. On connait la suite.

    Ce savant fut un homme comblé d'honneur : Chevalier d'Empire, Baron sous Louis XVIII, Pair de France sous Louis-Philippe... Pour un politique, un tel parcours serait suspecté d’opportunisme... Mais à un savant, tout est pardonné. Surtout en ce temps où le scientisme commence à s’emparer des esprits.

    Car Cuvier fut surtout l'initiateur de la paléontologie scientifique et de l'anatomie comparée : En se fondant sur leur organisation interne, Cuvier a établi les rapports des êtres vivants entre eux, et publie en 1817 Le Règne animal distribué d'après son organisation. La loi de subordination des caractères des animaux et de leurs organes lui permet d'établir une classification naturelle entre les espèces. Le système nerveux, « qui est au fond tout l'animal », donne les embranchements ; les organes de la respiration et de la circulation donnent les classes ; des organes de plus en plus subordonnés donneront successivement les ordres, les familles, les tribus, les genres, les espèces. Voilà le poète dont parlait Balzac en pleine ébullition : comme quoi, cela sert à quelque chose de s'ennuyer quinze ans à Montbéliard.

    Cuvier développera surtout cette méthode dans son grand ouvrage sur l'Histoire naturelle des Poissons (1828-1831). Mais la gloire de Cuvier fut d'être le romancier des fossiles : Oserons-nous dire le Balzac des invertébrés ? En 1812, première édition des Recherches sur les ossements fossiles où l'on rétablit les caractères de plusieurs animaux dont les révolutions du globe ont détruit les espèces, auquel il rajoutera par la suite le fameux : Discours sur les révolutions de la surface du globe et sur les changements qu'elles ont produits dans le règne animal. Cuvier met au point sa théorie de l'utilité des catastrophes (catastrophisme) qui finira par l'opposer à Darwin.

     

    Nous sommes assez loin de l'histoire lyonnaise : Cuvier mourut en 1832 et en 1848, la municipalité de Lyon tint à rendre hommage à ce savant de Franche-Comté en lui offrant l'une des rues qui venait, depuis peu d'être, aménagée à la place des anciens brots de la rive gauche du Rhône. Pourquoi Cuvier ? Depuis sa création assez récente, cette nouvelle voie avait été, une rue d'Angoulême, puis une rue d'Orléans. L'histoire filait, le siècle passait : on souhaitait marquer par un hommage à un scientifique la naissance d'une nouvelle République, qui eut hélas la vie courte. La rue, elle, a gardé son nom jusqu'aux jours actuels. Elle permet de filer du boulevard des Brotteaux jusqu’au quai du Général Serrail, traversant donc tout le sixième arrondissement, d'une gare à un fleuve : voilà ce qu’on appelle une rue sans histoire.

     

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    photos : les deux âges de Cuvier

     

  • Morellet

    On a donné à cette rue du sixième arrondissement le nom du philologue et littérateur abbé Morellet, né à Lyon le 7 mars 1727, dans une famille de marchand papetier, au sein de laquelle il fut l'ainé de quatorze enfants. Élevé chez les jésuites, il se passionna très tôt pour l'écriture et la rhétorique, auprès de son régent, l'abbé Fabri. A l'âge de quatorze ans, son père l'envoya au séminaire des Trente Trois à Paris pour achever ses études. Au début de sa carrière, dans les années 1750, l'abbé Morellet est séduit par les idées audacieuses des Lumières. Il collabore à l'Encyclopédie (articles Fils de Dieu, Foi, onomatopée, gomariste ...) et fréquente Turgot, M de Malesherbes, Diderot, d'Alembert.

    1654967105.jpgA la mort du pape Benoit XIV, il part à Rome pour assister au conclave qui s'y tient. C'est là qu'il découvre et traduit Le Manuel des Inquisiteurs de Nicolas Eymerich, qui parut en 1762. De retour à Paris, il réintègre la vie mondaine et le cercle des philosophes, où Voltaire le surnomme "l'abbé Mords-les" Après avoir assisté à la première de la fameuse comédie des Philosophes de Palissot (dont Diderot parle dans Le neveu de Rameau), il écrit une violente diatribe contre l'auteur, ce qui lui vaudra deux mois de Bastille en été 1761. Mois qu'il mit à profit en fréquentant assidument la bibliothèque de la Bastille. Outre quatre-vingt dix romans survolés, il lut alors Les Essais philosophiques de Hume, Tacite en entier et deux fois Agricola. Au livre X des Confessions, Jean Jacques Rousseau donne quelques détails de cette aventure. Effrayé par les événements révolutionnaires, Morellet gagne ensuite le parti de la réaction.

    Sa nièce, Madame Chéron, a pu animer grâce à lui et à ses réseaux un véritable cercle littéraire à Lyon. Il a eu de véritables querelles avec certains de ses contemporains, notamment Geoffroy et Grimm. Il fut reçu à l'Académie Française le 28 avril 1783. Lorsque l'Académie ferma, en 1792, c'est lui qui sauva les registres de délibérations, le manuscrit du Dictionnaire et les titres de la Compagnie, qu'il remit, en 1803, à l'Institut : cela vaut bien une plaque de rue !

    « Arrivé à l'âge de soixante-dix ans, et une époque où je ne suis plus très éloigné du terme de ma carrière, que les troubles au milieu desquels nous vivons peuvent d'un moment à l'autre abréger encore, je veux profiter du temps qui me reste pour jeter un coup d'œil en arrière sur le chemin que 'ai fait dans la vie, me rappeler les obstacles que j'y ai rencontrés, les moyens qui m'ont aidés quelquefois à les vaincre, les liaisons que j'ai formées, le caractère des hommes de quelques valeur que j'ai connus, les affaires de quelque importance publique auxquelles j'ai pris une faible part, enfin les événements de ma vie privée, et l'ordre de mes travaux littéraires. »  C'est ainsi que débutent les Mémoires de l'abbé Morellet, littérateur et religieux insolite, qui ne parurent qu'en 1821.

    L'abbé Morellet s’est éteint à Paris, le 12 janvier 1829

     

     

  • Jaboulay

     

    Mathieu Jaboulay est né le 3 juillet 1860 à Saint-Genis-Laval, dans le département du Rhône. Il fut interne dans les hôpitaux de Lyon dès l'âge de vingt et un an et demeure dans l'histoire locale comme le dernier chirurgien-major de l'Hôtel-Dieu, où il fut le maître d'Alexis Carrel. En 1901, c'est lui qui succéda à Ollier dans la chaire de clinique chirurgicale.

    Sa carrière commença sous l'égide de l'asepsie, dont il fut à Lyon le premier représentant. Le sublimé, l'acide phénique, l'iodoforme n'ont jamais paru dans son service hospitalier; seuls furent utilisés les instruments, les liquides, les objets de pansements stérilisés par la chaleur la plus élevée, capable seule de détruire les agents infectieux sans altérer la résistance de l'organisme. Il fut le premier à pratiquer les opérations abdominales; la chirurgie du grand sympathique, dérivant d'une idée physiologique, fut son plus beau titre de gloire. Il fut par ailleurs pionnier de la greffe du rein en 1906, réalisant deux transplantations de reins au coude de patients insuffisants rénaux, qui se soldèrent hélas par un échec.

    Mathieu Jaboulay est mort dans l'accident de chemin de fer de Melun, le 4 novembre 1913, alors qu'il allait à Paris pour présider le concours d'agrégation.

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    Le 17 novembre de cette même année, l'ancienne rue de la Lône, dans le septième arrondissement, recevait son nom.

     

     

     

  • Chauveau (quai)

    Lorsque le 4 août 1761, un Arrêt du Conseil d'Etat du Roi, portant les signatures de Lamoignon et de Bertin, instituait l'Ecole vétérinaire de Lyon, personne ne se doutait que de cet arrêt naitraient les découvertes les plus importantes concernant la cardiologie moderne. C'est en janvier 1762 qu'en bordure de Saône, entre Bourgneuf et Vaise, s'ouvrit effectivement la plus ancienne école vétérinaire du monde. C'est entre ses murs qu'allait se dérouler, à partir de 1848, la plus grande partie de la carrière scientifique de Jean-Baptiste Nicolas Chauveau, né à Villeneuve le Guyard en 1827, mort à Paris en 1917. Professeur, puis Directeur de cette Ecole, titulaire de la Chaire de Médecine expérimentale et de Pathologie comparée à la Faculté de Médecine de Lyon, Inspecteur général des écoles vétérinaires, Professeur au Museum d'Histoire naturelle de Paris, il présida tour à tour l'Académie de Médecine et celle de Science.

    Son titre de gloire fut, à partir de l'observation du coeur du cheval - aux battements lents malgré sa puissance - de créer la cardiologie intracardiaque, autrement dit de mettre à jour la description exacte de la circulation du sang à l'intérieur du cœur et de révéler sa physiologie telle que nous la connaissons encore aujourd'hui dans ses points essentiels. Après la réussite de ses recherches dans le domaine cardiaque, Chauveau s'intéressa au système nerveux et à l'énergétique biologique. Il parvient à établir le fait que la combustion du glucose s'opère dans les muscles. Les chevaux, les poules, les cochons de l'école vétérinaire du quai qui porte à présent son nom furent d'année en année le terrain de l'observation minutieuse des mécanismes les plus complexes : "comme il n'y a qu'une seule vérité, proclamait-il, il n'y a qu'une seule médecine pour les hommes et pour les animaux".

    RTEmagicC_chauveau_04_gif.gifDès 1866, Chauveau affirme que : « les maladies virulentes n’ont pas d’autres causes que la contagion ; celle-ci procède toujours d’un agent spécial, le virus, organisme ou organite, que la spontanéité vitale est impuissante à créer de toutes pièces ; l’étude d’un tel agent peut être faite par les méthodes applicables à l’histoire naturelle des êtres vivants ; la méthode expérimentale le déterminera bientôt et cette découverte sera le point de départ de recherches qui permettront peut-être d’opposer à chaque virus pernicieux un agent atténué de même famille jouant le rôle, jusqu’à présent unique, du virus vaccinal. » Avant Louis Pasteur, Chauveau découvre que le mode d’inoculation influe sur la gravité de la pathologie déclenchée et qu'un virus ingéré pourra ainsi avoir des conséquences mortelles alors que, introduit dans les veines, il n’aura que des effets bénins sur l’organisme. A partir de là, il fit ainsi des recherches approfondies en bactériologie, détermina même contre celui-ci le principe de l'addition en immunologie, qui fut à la base de ses illustres découvertes.

    Le promeneur qui longe sur la rive droite les quais de Saône s'arrête souvent devant les grilles du Conservatoire de Musique, l'un des plus beaux bâtiments de Lyon, pour admirer la grille et la galerie somptueusement édifiée par Chabrol, qui réunit les deux ailes du cloitre. Jadis, se tenait là un hôpital, dit des Deux-Amants. On le détruisit et, le 25 mars 1493, en présence de Charles VIII et d'Anne de Bretagne, fut posée la première pierre du couvent des petits Cordeliers (les grands étaient à Saint-Bonaventure), lequel couvent des Cordeliers de l'Observance devint l'Ecole Vétérinaire de Chauveau. Sur l'aile de gauche se trouve le buste léonin de Chauveau. Depuis 1978, l'école vétérinaire siège à Marcy l'Etoile et dans ces lieux vénérables du quai Chauveau, on étudie, de tout cœur, la musique.

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  • Jacquard

     

    Joseph Marie Jacquard naquit à Lyon, le 7 juillet 1752. Il fut d’abord tailleur de pierres à Couzon, le bourg paternel. Lorsque son père vendit son domaine pour devenir tisseur, il acheta plusieurs métiers. Jusqu’alors, le tissage des étoffes brochées se faisaient à la main. Les fils de chaîne – entre lesquels on passait des fils de trame polychromes du dessin - étaient soulevés par des « tireurs de lacs », le plus souvent des enfants. Jacquard emplit cette fonction dans Metier-Jacquard-01.jpgl’atelier paternel, et réfléchit à un moyen de mécaniser le travail. A partir de l’observation des recherches antérieures, notamment celles de Vaucanson, il mit sur pied une machine brevetée en 1801. Le dispositif de Jacquard permit de lever automatiquement les fils grâce à 4 éléments : la traverse, les aiguilles horizontales, le carré mobile et les cartes perforées, un peu comme dans un orgue de barbarie. Ces perforations déterminaient l’exécution du dessin. Un métier Jacquard supprimait cinq tireurs de lacs, et la machine ne fut pas accueillie partout avec des cris de joie parmi les tisseurs. Il reçut même des menaces de mort. En 1807, la ville de Lyon lui acheta pour 8000 francs de rente le droit de disposer de son invention. Il se retira à Oullins où il mourut le 7 août 1834.

    La statue de Jacquard (œuvre de Foyatier) trône à présent au centre de la place de la Croix-Rousse, après que le sergent Blandan a été érigé place Sathonay où il se trouvait initialement. On raconte que Napoléon, qui visitait l’Exposition des produits industriels de Lyon au Palais Saint-Pierre le 12 avril 1805, se fit expliquer par l’ingénieur lui-même tous les détails du fonctionnement de la mécanique, puis le décora en personne de la Légion d’Honneur. On peut d’une certaine façon voir dans le traitement de l’information des mécaniques Jacquard l’ancêtre de l’ordinateur. La rue Jacquard débute au cœur de la Croix-Rousse, place de Tapis, et rejoint la rue Philippe de La Salle.

    « On rencontrait parfois, dit M. Constantin Zukowski, un grand vieillard courbé par l’âge, revêtu d’une longue redingote à la boutonnière de laquelle pendait la Légion d’Honneur, qui se promenait lentement sous les tilleuls d’Oullins : c’était Jacquard. Il penchait la tête sur une de ses épaules, et son visage décharné empreint d’une langueur triste prouvait la trace de ses longues souffrances et de son labeur opiniâtre. De temps en temps, le vieillard s’arrêtait dans sa promenade et il prêtait l’oreille aux vagues rumeurs qui montaient de la cité, portées par le vent du nord. Elles lui apportaient le bruit des innombrables métiers à soie auxquels il avait donné le mouvement de la vie. C’était sa postérité à lui. Alors le vieillard souriait doucement en pensant à ses concitoyens qui l’avaient si longtemps méconnu et que sa mécanique enrichissait à présent. Il reprenait sa promenade et son rêve ininterrompu ».

     

     

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    Jacquard présente son métier à l'Empereur