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Scientifiques

  • Edmond Locard

    Ce personnage presque légendaire eut pour modèle Sherlock Holmes[1], Hans Gross[2], Rodolphe Heiss[3] : La rue qui porte son nom débute avenue du Point du Jour et s’achève rue des Aqueducs.

    Quelques mois après la naissance d’Edmond Locard à Saint Chamond (Loire) le 13 décembre 1877, sa famille s'installa quelques années plus tard à Lyon où il réalisa au collège saint Thomas d’Aquin des études brillantes : à dix-huit ans, il savait lire et écrire 11 langues dont le grec, le latin, l'hébreu et le sanskrit). En 1894, il entreprit à la faculté de Pharmacie et Médecine de Lyon des études de médecine, d’abord auprès du Pr. Ollier, maître français de la chirurgie orthopédique, puis, après la mort de ce dernier, auprès du célèbre Pr. Lacassagne avec qui il acheva ses études par 2 années de spécialisation en médicine légale, « la plus compréhensive des sciences médicales, la moins spécialisée, celle qui est en rapport avec le plus de sciences annexes », d'après lui. Il soutient sa thèse de Dr. en médecine le 17 mars 1902 : « La médecine légale au XVIIe siècle d'après des notes de Blegny ». Tout en travaillant au coté du Pr. Lacassagne, Edmond étudie le Droit de 1902 à 1905 puis la psychologie afin de mieux comprendre ce qui entoure la médecine légale: la justice et la psychologie des criminelles. En 1909, il obtient l’autorisation de s’installer dans les combles du Palais de Justice rue Saint-Jean ; c’est là qu’il fonde le premier laboratoire de police technique.  En 1914, il fut mobilisé deux ans plus tard  comme officier du chiffre chargé d'aider à décoder les messages secrets allemands.

    edmondlocard.jpgAu sein de son laboratoire, Edmond Locard utilise, développe et perfectionne de nombreuses techniques pour perfectionner son principe: « Tout auteur d'un crime laisse obligatoirement sur les lieux de son forfait des témoins matériels de sa présence et emporte avec lui des éléments de ce milieu. » Parmi elles, l’étude perfectionnée des empreintes digitales, la poroscopie  (une méthode qui examine les pores de la peau présents dans les empreintes digitales) les traces de pas, les ongles (« Le curage des ongles des suspects doit être une des premières opérations à réaliser car il peut y avoir du sang, des poils, des cheveux, des fils de vêtement ») les empreintes dentaires (aussi bien celles de l'agresseur sur sa victime ou l'inverse que sur un objet, un fruit, etc.) les traces de vêtements, les taches de sang, l’étude des documents écrits….

    De 1931 à 1940, Locard rédige Le Traité de Criminalistique en 7 volumes, contenant une méthodologie détaillée au sujet de l'enquête criminelle, la recherche des empreintes et des traces, les preuves de l'identité, l'expertise des documents écrits et la recherche des falsifications. Et chaque exposé est illustré par les affaires les plus célèbres résolues dans les plus grands laboratoires d'Europe

    Edmond Locard travaille au laboratoire jusqu'à ces 74 ans (1954). Sa biographie est réalisée en 1957 par Robert Corvol « Dr Edmond Locard. Mémoires d'un criminologiste » Il meurt à 89 ans en 1966.

      

    Edmond Locard fut par ailleurs passionné de littérature, de peinture, de musique (il fut critique musical pour la Revue Musicale Lyonnaise). Il fut aussi philatéliste, botaniste, et devint membre de l'Académie du Merle Blanc (déjeuners hebdomadaires rassemblant les grandes personnalités lyonnaises), de l'Académie des Sciences et Belles Lettres (où il présentera pas moins de 21 communications) et président de la société des Amis de Lyon et de Guignol. En 1959 est organisé le premier prix « Edmond Locard » de littérature policière qui récompensera le livre de H. Clary De fil en aiguille.



    [1] Edmond Locard rencontrera même Arthur Conan Doyle.

    [2] Juge d'instruction devenu professeur de droit criminel à l'université de Vienne. Il propose une esquisse de techniques d'interrogatoire et une utilisation systématique du témoignage des experts scientifiques. Il publiera un manuel d'instruction judiciaire qui comprend l'ensemble des disciplines développées au laboratoire de police de Lyon quelques années plus tard.

    [3] Directeur et fondateur de l'Institut de police scientifique de l'Université de Lausanne, première école de police scientifique au monde (1909), il développe l'application de la chimie et sciences physiques à la recherche d'empreintes, de faux, etc.

     

  • Professeur Grignard

    Victor Grignard, né le 6 mai 1871 à Cherbourg où son père était chez d’atelier à l’Arsenal, a sa rue dans le septième arrondissement de Lyon, non loin des universités, du quai Claude Bernard jusqu’à la place Jean Macé. Bachelier en 1887, il avait obtenu du lycée de Cherbourg qui porte à présent son nom l’assurance de recevoir une bourse pour préparer le concours de l’Ecole Normale Supérieure. Malheureusement l'Exposition Universelle de 1889 coûta si cher que la ville de Paris supprima les bourses et, ses parents n'ayant pas de quoi lui payer la préparation au concours espéré, il fut amené à présenter en 1889 celui d'entrée à l'École Normale Secondaire Spéciale de Cluny. Cette dernière fermant ses portes en 1891, lors d'une réforme des études secondaires, il fut, avec ses compagnons, affecté à la faculté des sciences de Lyon, dans laquelle il devint dès la rentrée 1895 préparateur, pour un salaire de mille deux cents francs par an. A la rentrée de 1895,  il travailla directement avec Philippe Barbier (1848-1922) dont il devait plus tard dresser le portrait suivant : «Elève de Berthelot, c’était un esprit très indépendant, qui n'avait pas craint, malgré l'autorité du Maître, d'adopter d'enthousiasme la théorie atomique.  De caractère un peu rude, il intimidait les débutants […]. Sa science chimique était très vaste, il remuait constamment des idées nouvelles […]... et s'il les abandonnait parfois un peu vite, sans les avoir retournées en tous sens, je serais mal venu à lui en adresser le reproche puisque s'il ne m'avait pas, après quelques essais peu encourageants, complètement abandonné l'emploi du magnésium en chimie organique, je n'aurais pas eu l'occasion de faire la découverte que vous savez.  C'est avec une profonde émotion que j'évoque le souvenir des 14 années vécues près de lui et de la sincère amitié qui nous a liés ».

    Grignard eut en ce temps là ses habitudes à la Brasserie Georges. L'examen des cahiers de laboratoire de Grignard a permis de suivre la mise au point du réactif qui porte son nom : formation préalable dans l'éther d'une solution du réactif auquel il  attribua tout de suite la formule RMgX, et ensuite seulement addition du réactif carbonylé.  Le 18 juillet  1901, il soutint sa thèse de chimie (Sur les combinaisons organomagnésiennes mixtes et leurs applications à la synthèse d'acides, d'alcools et d'hydrocarbures »), est encouragé par Berthelot, et devient peu à peu une célébrité à tel point que des néologismes se créent pour qualifier ses expériences (« grignardiser » ou « faire un grignard »).

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    Victor Grignard enseigna la chimie à Besançon et Nancy (où naquit son fils unique) avant de partager avec Paul Sabatier un Nobel de Chimie en 1912. Il est mobilisé deux ans plus tard comme garde-côte dans la région de Cherbourg puis nommé grâce à des appuis à la direction du matériel chimique de guerre, dont le laboratoire est à la Sorbonne. C’est là qu’il analyse les produits asphyxiants utilisés par les Allemands. On le retrouve en 1917 aux Etats-Unis, où il donne des conférences sur les relations entre la science et l’industrie en temps de guerre. Après l’armistice, il s’installe à nouveau à Lyon, d’abord non loin de la magnifique Ile Barbe, puis dans une villa proche de la faculté de médecine. Il est élu en 1926 à l’Académie des Sciences, dont il devient doyen trois années plus tard.

     

    Le 14 décembre 1935, il meurt dans sa  66ème année à la clinique Saint-Charles, après avoir dirigé la publication en 23 tombes chez Masson d’un gigantesque Traité de chimie organique.

    Ci-dessous et de sa main, sa devise, empruntée sur le site du lycée qui porte son nom :

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    Chacun de nous a son étoile. Suivons-là en nous félicitant de la voir chaque jour un peu plus loin

  • Professeur Beauvisage

    Il naquit le 29 janvier 1852, dans la capitale. Son père, Ernest Beauvisage, était chef de Cabinet du Directeur général de la Caisse des dépôts et consignations, et auteur d'importants travaux de statistiques. Mais la mort de ce dernier l’obligea à quitter le lycée Louis-le-Grand bien avant le baccalauréat. Georges, Eugène Beauvisage fut d'abord employé à la Caisse des dépôts et consignations de 1869 à 1875. Il publia un grand nombre d'articles de géographie dans certains périodiques et surtout dans le Bien public. En même temps, il suivait des cours du soir pour mener à terme des études de médecine et de sciences naturelles. C'est ainsi que le 25 février 1881 il soutint, à Paris, sa thèse de doctorat en médecine et, qu'en 1882, il obtint le diplôme de licencié ès-sciences. Il fut nommé à ce moment préparateur de travaux pratiques à la Faculté de médecine de Paris. En 1883, il était reçu à l'agrégation d'histoire naturelle à la Faculté de médecine et de pharmacie de Lyon, et fut chargé du cours de Botanique à cette même Faculté, où il devait être nommé professeur titulaire en 1903. Cet infatigable travailleur avait obtenu entre temps, en 1891, le diplôme de pharmacien.

     

    Collaborant au Bulletin et aux Annales de la Société botanique de Lyon, il fut également l'auteur d'une Méthode d'observation fondée sur l'arithmétique et la géométrie concrètes, parue en 1901, qui avait pour objet de mettre les élèves en communication directe avec les leçons de la nature. Cette même année, Georges Beauvisage créa l'œuvre municipale des « Enfants à la montagne et à la mer» et de 1906 à 1910, il fit, au cours de différents congrès, une série de communications sur l'éducation des enfants anormaux, qui aboutit à la fondation de l'Œuvre de l'enfance anormale et à l'institution de classes spéciales dans les écoles municipales de Lyon.

    beauvisage_georges1129r3.jpgIl était, depuis 1896, conseiller municipal du maire Gailleton, devint  adjoint du maire Augagneur, et le demeura sous Herriot. Il fut élu sénateur du Rhône au renouvellement du 3 janvier 1909. Inscrit au groupe de la gauche démocratique, il fut membre de plusieurs Commissions et prit part à diverses discussions, notamment sur : la création d'écoles autonomes de perfectionnement pour les enfants arriérés (1909) ; le budget de l'Instruction publique (1911) ; l'amnistie (1913) ; les mesures tendant à combattre la dépopulation en relevant la natalité; la loi de finances (1914); le budget de l'exercice 1919, les traitements des professeurs de renseignement technique, les traitements des fonctionnaires, ouvriers et employés de l'Etat (1919) ; il déposa de nombreux rapports, ainsi qu'une proposition de loi sur l'éligibilité des femmes.

    Il ne se représenta pas au renouvellement de 1920 et se tint, dès lors, à l'écart de la vie politique. « Beauvisage fut non seulement un savant, écrit Louis Maynard dans son Dictionnaire de Lyonnaiseries, mais un brave et honnête homme. Il a rempli de nombreuses fonctions publiques et est mort sans laisser aucune fortune, malgré la modeste simplicité de sa vie. La mort l’a surpris (le 8 avril 1925) dans son étroit logis du cours Gambetta, alors qu’il mettait la dernière main à une étude très documentée sur le naturaliste lyonnais Poivre. »

    Il fut inhumé au cimetière du Père Lachaise, à Paris. Le 31 août 1925, l’ancien chemin de Grange Rouge, dans le huitième arrondissement, reçoit son nom.

    On lui doit divers travaux de morphologie et de classification végétales, parmi lesquels on peut citer : Les matières grasses naturelles (1890); Les matières grasses, caractères, falsifications et essai (1891); Recherches sur quelques lois pharaoniques (1896-1897).

  • Charles Mérieux

    Le 12 décembre 1975 au soir, on apprenait que Christophe, âgé de neuf ans, fils d’Alain Mérieux (PDG de l’institut Mérieux) avait été enlevé trois jours plus tôt sur le chemin de l’école de la Rédemption dans le sixième arrondissement de Lyon. Si la nouvelle était éventée, c’est parce que le rapt venait de se  solder par un happy end, comme on disait alors dans les colonnes de la presse à sensation. L’enfant avait été échangé contre une rançon de 20 millions de francs (deux milliards d’anciens pouvait-on lire un peu partout, ce qui a plus de gueule, avouez-le). 16 millions ne furent jamais récupérés.

    On apprenait en même temps que les deux grands pères du garçonnet, le docteur Charles Mérieux et le constructeur de camions Paul Berliet – les deux plus gros contribuables de la bonne ville de Lyon -, avaient conduit les transactions secrètes et réuni le flouze. Durant ces trois jours, la presse était demeurée muette et la police paralysée. Venu de Versailles, le  commissaire Claude Bardon avait été chargé dès le premier jour de cette affaire qui giflait de plein fouet l’establishment en la personne de l’héritier Mérieux. Le vieux truand lyonnais Louis Guillaud (surnommé La Carpe), qui fut arrêté le 26 février 1976 en train d'échanger des billets provenant de la rançon contre des lingots d'or, ne fut jamais probablement qu’un simple exécutant. En 1981, ce dernier est condamné à vingt ans. Il en fera quatorze. Aujourd'hui, il vit dans le Nord de la France, sa région d'origine. L'éxécution de Jean Pierre Marin, canardé par la police dans sa DS transformée en écumoire le 9 mars 1976 permit de classer l'affaire sans qu'on sût réellement quels en avaient été, en coulisses, les commanditaires.

    m_merieux.jpgHistoire d’une dynastie composée de quatre générations :

    -Marcel (1870-1937), fils de soyeux et  collaborateur de Louis Pasteur. Héroïque et légendaire moustachu pour avoir réussi le  « prodige ambigu » de faire fortune en faisant le bien » (1), internationalement connu depuis qu’il ouvrit à Vaise son premier Institut auquel il donna en 1897 son nom, c’est à lui qu’on dédia l’ancienne rue des Culates, qui traverse de part en part le quartier de Gerland dans le septième arrondissement. Les trois chevaux en bronze dans le parc de Marcy l’Etoile rappellent aujourd’hui l’élevage de chevaux utilisés dans la fabrication des sérums.

    -Jean et Charles ( 1907-2001). Charles succéda à son père à trente ans et devint peu le leader mondial des vaccins. C’est lui qui comprit dès 1945, en découvrant aux Etats Unis  les usines de guerre qui préparaient la lyophilisation du plasma humain qu’on pouvait concilier recherche scientifique et industrie. Il créa peu après une équipe de chercheurs pour la mise au point et la commercialisation des virus-vaccins : l’Institut Mérieux scellait sa vocation. Charles fut par ailleurs un passionné de cinéma et posséda personnellement quatre salles à Lyon.

    Son frère ainé, Jean, était mort des suites d’une méningite tuberculeuse, contractée dans le laboratoire paternel.

    -Alain, né en 1938, qui épousa le 10 juillet 1965 Chantal, la petite fille de Marius Berliet. C’est lui-même qui livra la rançon dans la cour d’une ferme de Saint-André-le-Corcy dans l’Ain, à 20 km de Lyon. Son frère, Jean, décède en 1994 dans un accident de la route.

    -Christophe et Rodolphe Mérieux : Rodolphe mourut  le 17 juillet 1996 dans le crash du vol TWA 8000 survenu au large de New York.  Christophe en 2006 décéda d’un malaise cardiaque. Le malheur des grands nourrissant les fantasmes des petits, on se mit à parler de malédiction Mérieux comme on parla ailleurs, mais à une autre échelle, de malédiction Kennedy ; le troisième héritier, Alexandre, né en 1974, est l’administrateur actuel du groupe.

     

     

    (1)  Pierre Mérindol : LYON, le sang et l’argent, Alain Moreau, 1987

  • Montgolfier

    montgolfier_etienne.jpgDepuis 1855, la rue Pichegru, ouverte sur le terrain des Hospices aux Brotteaux honore les inventeurs des "montgolfières", Joseph (1740-1810) et Etienne (1745-1799) de Montgolfier, nés tous deux à Vidalon les Annonay, douzième et quinzième enfants du fratrie de seize. La première expérimentation eut lieu le 4 juin 1783 à Annony. L'année suivante, deux ascensions mémorables d'aérostats furent expérimentées dans la plaine des Brotteaux en 1784 : l'une, le 19 janvier (entre les rues Dugesclin, Créqui, Vauban, Bugeaud) : Le ballon, parti en face de l’Hôtel Dieu a fini aux Charpennes; l'autre, le 4 juin, (entre les rues Duguesclin, Créqui, Sèze et Bossuet) : le ballon alla cette fois-ci jusqu'à la Duchère. Comme on le remarque, les commissions, dans leur grande précision, n'ont su donner le nom de Montgolfier qu'à une rue quelque peu éloignée du périmètre où eurent lieu les essais.

    Au moment de la première ascension, on doutait fort de son succès et de nombreuses épigrammes circulèrent. Le comte de Laurencin, qui devait être du voyage, reçut celui-ci:


    montgolfier_joseph.jpgFiers assiégeants du tonnerre
    Calmez cotre colère
    Eh ! ne voyez-vous pas que Jupiter, tremblant,
    Vous demande la paix par son pavillon blanc ?"


    L'hiver fort rigoureux avait par ailleurs plusieurs fois failli provoquer l'annulation du vol qui se déroula finalement devant 100 000 lyonnais. Cette première ascension faillit tourner mal pour les voyageurs, trop nombreux du Flesselles.. A l'intérieur, rien que du beau monde : auprès de Joseph Montgolfier, Fontaine, Pilastre de Rozier, le prince Charles de Ligne, le comte d’Anglefort , le comte de Laurencin, le marquis de Dampierre.

    Après 12 minutes de vol, une déchirure latérale apparaissant, Pilastre de Rozier lâcha du lest. Un passager affolé noya par erreur le foyer. « Le Flessellles » redescendit très vite et échoua piteusement dans les marécages des Charpennes. La montgolfière à moitié incendiée est irrécupérable : Dans la presse parisienne comme locale, l'événement fut salué (et raillé) par de nombreuses chansons. Cette première expérience lyonnaise valut cependant aux deux frères des lettres de bourgeoisie. Louis XVI anoblit les deux inventeurs et fit frapper une médaille en leur honneur.

    Lors de la seconde ascension (celle d'un aérostat nommé le Gustave, en raison de la présence du roi Gustave III de Suède), il n'y eut que deux voyageurs, M.Fleurant et une lyonnaise, Mme Tible, qui fut la première femme dans les airs.

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    démonstration lyonnaise du 19 janvier 1784
  • Berthelot

    L'avenue qui fut tracée afin de permettre l'extension de la ville, sur la rive gauche, à partir des deux ponts Napoléon (aujourd'hui ponts Kitchener et Gallieni) porta tout d'abord et tout simplement le nom d'avenue des Ponts. C'est sur cette avenue-là que fut édifiée l'Ecole de santé militaire, sous la direction de l'architecte Abraham Hirsch, architecte de la Ville. Le bâtiment fut inauguré 12 mai 1895, en raison de la relocalisation obligée de cette école située à Strasbourg avant 1871, et à la suite d'une compétition âpre avec celle de Bordeaux. Lyon en a obtenu l'implantation parce qu'elle accepta d'en payer entièrement la réalisation (2 500 000 franc-or de l'époque). Lorsque mourut Marcelin Berthelot (1827-1907), chimiste célèbre, homme politique réputé, écrivain reconnu, ami de Renan, il entra en grandes pompes au Panthéon et donna son nom à l'avenue des Ponts dans le septième arrondissement de Lyon. Avec la construction du tunnel de Fourvière, l'axe est devenu un des dégagements autoroutiers le plus important de la ville, qui traverse tout l'arrondissement.

    1210796069_2.jpgL'Ecole de santé militaire reste de sinistre mémoire pour avoir été réquisitionnée en février 43 et être devenue le siège de la Gestapo de Klaus Barbie. La façade sur l'avenue Berthelot a entièrement volé en éclat lors du bombardement américain du matin du 26 mai 1944 au cours duquel 200 tonnes de bombes, lâchées par les b-24 de la 15th Air Force de manière assez aléatoire sur l'avenue Berthelot et le quartier de Vaise, provoquèrent 1000 victimes parmi les civils (voir photo).

    Après le transfert de l'école au service de santé à Bron, l'ancienne école abrite depuis 1992 le Centre historique de la Résistance et de la Déportation, inauguré par Michel Noir, alors maire de Lyon, en présence de Jacques Chaban-Delmas, compagnon de la Libération et d'Elie Wiesel, prix Nobel de la Paix.

    L'avenue Berthelot est connue pour avoir abritée, en son extrémité située sur le huitième arrondissement, le jeune Jules Joseph Bonnot qui s'était installé au n° 228 en 1909, dans le logement du gardien du cimetière de la Guillotière, lorsqu'il était devenu l'amant de son épouse, Judith Thollon, surnommée la Louise Michel de la Guillotière. Après une longue cavale et un parcours sanglant, Jules Bonnot fut abattu à Paris, le 28 avril 1912, par le directeur de la police municipale. Quatre de ses complices furent condamnés à mort en 1921 et exécutés le 21 avril 1913 (Eugène Dieudonné, Raymond Callemin, André Soudy et Monier), après un procès de vingt-trois jours. Judith, pour sa part, écopa de quatre années de prison, malgré une lettre de Bonnot, qui l'innocentait.

  • Cuvier

    "Le Napoléon de l'Intelligence" (rien de moins !): Ainsi le nomma Jean Viennot, en 1932.

    Avant lui, Balzac lui-même s'était interrogé : "Cuvier n'est-il pas le plus grand poète de notre siècle ?" Bon, par conséquent Viennot ne fait en disant cela qu'imiter Balzac, dont on sait bien qu’il voyait des Napoléon partout (le Napoléon de la pharmacie, de la finance, du journalisme...) et qu’il avait l'hyperbole facile. Tout de même, tout de même... Le compliment a dû toucher Cuvier au cœur, Cuvier qui trône en chair de bronze en plein centre de sa ville natale, Montbéliard, juste en face du célèbre temple protestant. C'est dans cette ville-là qu'il passa les quinze premières années de sa vie. Et on imagine ce que pouvait être Montbéliard, de 1769 à 1784 ! Pas très gai, ni très animé… Comme les heures y sont lentes, la lecture d'un ouvrage de Buffon, trouvé par hasard dans la bibliothèque d'un de ses parents, l'égaye un peu. Cela éveille en lui le goût de l'histoire naturelle : une véritable vocation. Dès lors le jeune Cuvier part faire ses études à Stuttgart. Il devint ensuite précepteur à Caen, puis Fécamp, auprès de la famille Héricy en 1788.

    12495-004-060206B7.jpgC'est durant cet épisode qu'il entra en contact avec les naturalistes du Musée d'Histoire naturelle de Paris, en tant que suppléant à la chaire d'Anatomie où il effectua ses premiers pas en 1795. On connait la suite.

    Ce savant fut un homme comblé d'honneur : Chevalier d'Empire, Baron sous Louis XVIII, Pair de France sous Louis-Philippe... Pour un politique, un tel parcours serait suspecté d’opportunisme... Mais à un savant, tout est pardonné. Surtout en ce temps où le scientisme commence à s’emparer des esprits.

    Car Cuvier fut surtout l'initiateur de la paléontologie scientifique et de l'anatomie comparée : En se fondant sur leur organisation interne, Cuvier a établi les rapports des êtres vivants entre eux, et publie en 1817 Le Règne animal distribué d'après son organisation. La loi de subordination des caractères des animaux et de leurs organes lui permet d'établir une classification naturelle entre les espèces. Le système nerveux, « qui est au fond tout l'animal », donne les embranchements ; les organes de la respiration et de la circulation donnent les classes ; des organes de plus en plus subordonnés donneront successivement les ordres, les familles, les tribus, les genres, les espèces. Voilà le poète dont parlait Balzac en pleine ébullition : comme quoi, cela sert à quelque chose de s'ennuyer quinze ans à Montbéliard.

    Cuvier développera surtout cette méthode dans son grand ouvrage sur l'Histoire naturelle des Poissons (1828-1831). Mais la gloire de Cuvier fut d'être le romancier des fossiles : Oserons-nous dire le Balzac des invertébrés ? En 1812, première édition des Recherches sur les ossements fossiles où l'on rétablit les caractères de plusieurs animaux dont les révolutions du globe ont détruit les espèces, auquel il rajoutera par la suite le fameux : Discours sur les révolutions de la surface du globe et sur les changements qu'elles ont produits dans le règne animal. Cuvier met au point sa théorie de l'utilité des catastrophes (catastrophisme) qui finira par l'opposer à Darwin.

     

    Nous sommes assez loin de l'histoire lyonnaise : Cuvier mourut en 1832 et en 1848, la municipalité de Lyon tint à rendre hommage à ce savant de Franche-Comté en lui offrant l'une des rues qui venait, depuis peu d'être, aménagée à la place des anciens brots de la rive gauche du Rhône. Pourquoi Cuvier ? Depuis sa création assez récente, cette nouvelle voie avait été, une rue d'Angoulême, puis une rue d'Orléans. L'histoire filait, le siècle passait : on souhaitait marquer par un hommage à un scientifique la naissance d'une nouvelle République, qui eut hélas la vie courte. La rue, elle, a gardé son nom jusqu'aux jours actuels. Elle permet de filer du boulevard des Brotteaux jusqu’au quai du Général Serrail, traversant donc tout le sixième arrondissement, d'une gare à un fleuve : voilà ce qu’on appelle une rue sans histoire.

     

    cuvier.jpg

    photos : les deux âges de Cuvier