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criminologie

  • Lacassagne

    Chemin des Pins jusqu’en 1925, l’avenue Lacassagne dans le troisième arrondissement de Lyon rend hommage à une personnalité lyonnaise originale. Si de 1885 à 1914, en effet, Lyon fut la capitale de la criminologie française, c’est à Alexandre Lacassagne qu’elle le doit. Ce dernier était né à Cahors , le 17 août 1843 où ses parents tenaient un hôtel ; après des études à l’école du Service de santé Militaire à Strasbourg, il soutint une thèse sur les Effets psychologiques du chloroforme. De 1878 à sa retraite en 1823, Lacassagne occupa ensuite à Lyon la chaire de médecine légale. Son mariage avec Madeline Rollet, fille du professeur Rollet l’introduisit dans la bonne société lyonnaise de son temps.

     

    Le docteur Lacassagne fut l’un des premiers à utiliser les techniques de l’autopsie en criminologie.  Au fil de sa carrière son nom se trouva mêlé à de nombreuses affaires criminelles, du fait de cette spécialisation dans l’expertise médico-légale : la malle sanglante de Millery (1889), l’assassinat de Carnot (1894, Le tueur des veuves (1901). Lacassagne en vint de manière oblique à la littérature en raison de sa fréquentation des prisons et sa fascination pour la langue du milieu. En collaboration avec le chef des apaches de l’époque, Emile Nouguier, il rédigea un premier dictionnaire de l’argot. Il invitait les délinquants et condamnés de la prison Saint-Paul de Lyon à rédiger de brèves autobiographies  qu’il collecta dans ses célèbres cahiers. « Le milieu social est le bouillon de culture de la criminalité, écrivait-il. Le microbe, c’est le criminel, un élément qui n’a d’importance que le jour où il trouve le bouillon où il doit fermenter ».

    Féru de naturalisme, convaincu qu’on pourrait parvenir à éradiquer la criminalité en travaillant sur les milieux sociaux dont proviennent les criminels, il pensait ainsi, à la manière du Zola de la Bête Humaine, concocter une sorte de personnage-type et utile au progrès social. En s’appuyant sur la philosophie positiviste et la pensée hygiéniste, il fonda ainsi une méthode expérimentale particulière à la criminologie qui ferait école (Edmond Locard en sera le principal continuateur), et qui postulait que le crime est toujours l’interaction entre l’individu et son milieu. A rebours de la thèse du « criminel-né » soutenu par l’italien Cesare Lambroso,  Lacassagne n’eut ainsi de cesse de proposer des réformes pour les enfants abandonnés, contre l’alcoolisme, l’opium, les récits de crimes dans les journaux, la reproduction de portraits de criminels, la publicité des débats judiciaires, le spectacle des exécutions capitales etc… En contrepartie, il fut un ardent défenseur de l’ordre bourgeois, considérant par exemple les activistes anarchistes comme des tarés et les mouvements revendicatifs comme des maladies du corps social contre lequel il fallait se prémunir  par le fouet et la mis en place d’un code de sureté.

     Son métier l’amèna également à s’intéresser aux tatouages et à leurs significations ainsi qu’aux masques mortuaires.  

     Alexandre Lacassagne fut enfin un bibliophile averti, un grand « lecturier », comme il aimait à le dire. A tout âge, écrivit-il, « le livre est le vrai compagnon. Au soir de la vie, il est une force, une arme contre l’ennui, terrible compagnon des vieillards inoccupés. Reprendre et relire les ouvrages de sa jeunesse, c’est la revivre avec les bienfaits de l’expérience acquise. Les donner, enfin, n’est-ce pas continuer sa vie dans l’esprit des autres ? » Il offrit ainsi en 1921 plus de 12 000 titres à la Bibliothèque municipale de Lyon (actuel fonds Lacassagne, composé de documents manuscrits et imprimés). Il fut l’auteur de nombreux manuels, articles, traités, dont un Précis de médecine légale (1906) qui fit longtemps autorité. En février 1924, il est renversé par un automobiliste au sortir de son domicile, et il décède le 24 septembre de la même année.

     

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    Ses fils Antoine Lacassagne (1884-1971) et Jean Lacassagne (1886-1960) ont mis leurs pas dans les sentiers scientifiques et médicaux qu’il avait tracés : le premier en devenant spécialiste des rayons X et directeur de l’Institut du radium, le second  chef de clinique à l’Antiquaille. On salue au passage le fait que Jean Lacassagne fut à l’origine de la pétition qui permit de sauver le clocher de la Charité lors de la destruction de l’hôpital décidée par Herriot en 1834.C’est également lui le fondateur de la célèbre revue Le Crocodile (1924-1967), et de plusieurs livres sur l’argot  dont en 1828 un dictionnaire préfacé par Francis Carco, L’argot du milieu.

  • Edmond Locard

    Ce personnage presque légendaire eut pour modèle Sherlock Holmes[1], Hans Gross[2], Rodolphe Heiss[3] : La rue qui porte son nom débute avenue du Point du Jour et s’achève rue des Aqueducs.

    Quelques mois après la naissance d’Edmond Locard à Saint Chamond (Loire) le 13 décembre 1877, sa famille s'installa quelques années plus tard à Lyon où il réalisa au collège saint Thomas d’Aquin des études brillantes : à dix-huit ans, il savait lire et écrire 11 langues dont le grec, le latin, l'hébreu et le sanskrit). En 1894, il entreprit à la faculté de Pharmacie et Médecine de Lyon des études de médecine, d’abord auprès du Pr. Ollier, maître français de la chirurgie orthopédique, puis, après la mort de ce dernier, auprès du célèbre Pr. Lacassagne avec qui il acheva ses études par 2 années de spécialisation en médicine légale, « la plus compréhensive des sciences médicales, la moins spécialisée, celle qui est en rapport avec le plus de sciences annexes », d'après lui. Il soutient sa thèse de Dr. en médecine le 17 mars 1902 : « La médecine légale au XVIIe siècle d'après des notes de Blegny ». Tout en travaillant au coté du Pr. Lacassagne, Edmond étudie le Droit de 1902 à 1905 puis la psychologie afin de mieux comprendre ce qui entoure la médecine légale: la justice et la psychologie des criminelles. En 1909, il obtient l’autorisation de s’installer dans les combles du Palais de Justice rue Saint-Jean ; c’est là qu’il fonde le premier laboratoire de police technique.  En 1914, il fut mobilisé deux ans plus tard  comme officier du chiffre chargé d'aider à décoder les messages secrets allemands.

    edmondlocard.jpgAu sein de son laboratoire, Edmond Locard utilise, développe et perfectionne de nombreuses techniques pour perfectionner son principe: « Tout auteur d'un crime laisse obligatoirement sur les lieux de son forfait des témoins matériels de sa présence et emporte avec lui des éléments de ce milieu. » Parmi elles, l’étude perfectionnée des empreintes digitales, la poroscopie  (une méthode qui examine les pores de la peau présents dans les empreintes digitales) les traces de pas, les ongles (« Le curage des ongles des suspects doit être une des premières opérations à réaliser car il peut y avoir du sang, des poils, des cheveux, des fils de vêtement ») les empreintes dentaires (aussi bien celles de l'agresseur sur sa victime ou l'inverse que sur un objet, un fruit, etc.) les traces de vêtements, les taches de sang, l’étude des documents écrits….

    De 1931 à 1940, Locard rédige Le Traité de Criminalistique en 7 volumes, contenant une méthodologie détaillée au sujet de l'enquête criminelle, la recherche des empreintes et des traces, les preuves de l'identité, l'expertise des documents écrits et la recherche des falsifications. Et chaque exposé est illustré par les affaires les plus célèbres résolues dans les plus grands laboratoires d'Europe

    Edmond Locard travaille au laboratoire jusqu'à ces 74 ans (1954). Sa biographie est réalisée en 1957 par Robert Corvol « Dr Edmond Locard. Mémoires d'un criminologiste » Il meurt à 89 ans en 1966.

      

    Edmond Locard fut par ailleurs passionné de littérature, de peinture, de musique (il fut critique musical pour la Revue Musicale Lyonnaise). Il fut aussi philatéliste, botaniste, et devint membre de l'Académie du Merle Blanc (déjeuners hebdomadaires rassemblant les grandes personnalités lyonnaises), de l'Académie des Sciences et Belles Lettres (où il présentera pas moins de 21 communications) et président de la société des Amis de Lyon et de Guignol. En 1959 est organisé le premier prix « Edmond Locard » de littérature policière qui récompensera le livre de H. Clary De fil en aiguille.



    [1] Edmond Locard rencontrera même Arthur Conan Doyle.

    [2] Juge d'instruction devenu professeur de droit criminel à l'université de Vienne. Il propose une esquisse de techniques d'interrogatoire et une utilisation systématique du témoignage des experts scientifiques. Il publiera un manuel d'instruction judiciaire qui comprend l'ensemble des disciplines développées au laboratoire de police de Lyon quelques années plus tard.

    [3] Directeur et fondateur de l'Institut de police scientifique de l'Université de Lausanne, première école de police scientifique au monde (1909), il développe l'application de la chimie et sciences physiques à la recherche d'empreintes, de faux, etc.