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  • Bancel

    Jusqu'au 30 mars 1897, cette rue a porté le nom de rue des Culattes. La dénomination actuelle rappelle l'existence de Désiré Bancel (1823-1873), né et mort à Valence dans la Drôme, où il possède d'ailleurs sa statue. L'ancienne appellation signifiait probablement que la voie, en contre-bas, était sans issue, ce qui correspond assez bien à l'aspect ancien des bords du Rhône sur cette partie du septième arrondissement qui lui est mitoyen.

    Désiré Bancel fut membre du parti de la Montagne, en 1849. Il combattit avec vigueur la politique du Prince-Président Louis Napoléon Bonaparte. Après le coup d'état de 1851, il dut s'exiler à Bruxelles, où il professa avec succès à l'Université libre. Louis Maynard cite un extrait de lui que je recopie, car il nous aide à nous rappeler la grande diversité de notre héritage, fait de pierres, de villes et de rues, certes, mais aussi de paroles :

    "Il ne suffit pas de remplacer la monarchie par les institutions populaires. Il faut que celles-ci soient fondées sur le droit et sur la liberté, sans lesquels la Démocratie est le pire des esclavages. Nous avons besoin d'esprits également éloignés de la servitude et de la chimère, résolus à pratiquer tout ce qui est possible dans le véritable intérêt du peuple, et à rejeter tout ce qui pourrait porter atteinte à la souveraineté efficace".

    La souveraineté efficace, Désiré Bancel tenta à sa façon de la servir. Il devint député du 3ème arrondissement de Lyon, et c'est ce titre que la municipalité gratifia sa mémoire d'une plaque bleue. Désiré Bancel publia aussi quelques vers en revues, dont certains furent retrouvés, tels ceux-ci, datant de 1844 :


    Ce souvenir charmant dont vous parlez, Madame,
    Nous le conserverons
    Frais, souriant et doux, dans le fond de votre âme,
    Et nous raconterons

    -Plus tard, quand notre front se chargera d’années,
    Lorsque nous serons vieux,
    En recueillant les fleurs des heures fortunées
    Pour nos enfants joyeux –

    Nous raconterons tous l’ancien pèlerinage
    Que nous fîmes jadis,
    L’air vif et le ciel bleu, les chansons du voyage
    La place où nous étions assis,

    Notre orgueil abattu, nos regrets pleins de charmes
    Et nous dirons aussi :
    Quatre jours, mes enfants, sans tristesse et sans larmes
    Sont bien rares ici.

    Du charmant souvenir qui parfume notre âme,
    Nous deviendrons jaloux ;
    Et comment n’être pas jaloux, enfin, Madame ?
    Vous étiez avec nous.

     

  • Saint-Antoine

    Avant d'être consacrée à la Vierge par le vœu des échevins en 1642, la ville de Lyon était dédiée à Saint-Antoine. Les Antonins étaient d'ailleurs fort puissants à Lyon : ils avaient par exemple le privilège de laisser divaguer leurs porcs dans les rues de la cité; ces animaux en assuraient le nettoyage, mais causaient aussi de grands dommages : aussi, en 1550, le Consulat enjoignit aux religieux de "faire retirer leurs pourceaux qui vont de par la ville de nuit, autrement il donnerait commission à l'exécuteur de justice de les tuer". Des reliques de Saint-Antoine, rapportées d'Outre-mer vers 1070, furent à l'origine du monastère dauphinois, puis lyonnais, où accouraient les malades atteints du feu sacré ou dumal des ardents. En 1280, l'archevêque Adhémar de Roussillon octroya de façon définitive aux Antonins le vieil hôpital de la Contracterie, primitivement destiné aux estropiés, ainsi que l'église et son cimetière limitrophe. Le monastère ainsi créé sur cette belle portion de terrain prit le nom de Saint-Antoine, de même que le quartier environnant et le quai longeant la Saône.

    Dans la première partie du XIX ème siècle, le quai Saint-Antoine abritait plusieurs relais de diligences pour la Provence ou le Languedoc. C'est également sur ce quai que Léon Boitel, le fameux imprimeur inventeur de la Revue du Lyonnais, installa ses ateliers en 1834.

    Le théâtre du Gymnase, où se jouaient la comédie, le vaudeville et l'opérette, y siégea durant le Second Empire, puis devint le fameux théâtre où Pierre Rousset triompha avec ses parodies théâtrales jouées en marionnettes à gaines : Tancrède de Visan écrit à ce propos dans Le Guignol lyonnais : « Le théâtre du Gymnase demeure la Comédie-Française de Guignol. Le Guignol du passage de l'Argue n'est que l'Odéon ».

    Ce lieu mythique ferma ses portes en 1966. A présent, si les Lyonnais connaissent le quai Saint-Antoine, c'est surtout en raison du marché qui s’y tient régulièrement.

     

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  • Octavio Mey

    Cette rue s'est appelée jadis la rue Poulaillerie Saint-Paul. Le nom qu'elle porte à présent est celui d'un marchand fabricant lyonnais, mort en 1690, auquel nous devons l'art de lustrer les soies. Mal dans ses affaires et à la veille de faire banqueroute, Octavio Mey allait et venait dans sa chambre, un soir de 1655, occupé à réfléchir les pertes considérables qu'il venait de subir et rêvant aux moyens de les réparer; sans y prendre garde, il mit quelques brins de soie dans sa bouche et les mâcha. Frappé de l'éclat que ces brins de soie avaient acquis par l'humidité et la pression exercée par ses dents, il répéta l'exercice avec plus d'attention et conçut le procédé qui lui assura une nouvelle fortune.

    Il jugea que l'éclat venait de trois causes :
    - la soie avait été pressée
    - la soie avait été mouillée
    - la soie avait été un peu échauffée
    Sur ce principe, il inventa la machine à faire les taffetas.


    Octavio Mey est également connu pour avoir été un bienfaiteur et un mécène. Il acheta notamment le bouclier de Scipion, repêché par des pêcheurs dans le Rhône en 1656 non loin d'Arles. Il s'agit en réalité d'un des plus grands plats en argent conservé de l'Antiquité dans un aussi bel état.

    Son gendre, M de Paylata, le vendit en 1697 à Louis XIV pour le Cabinet des Médailles, par l'intermédiaire du Père de la-Chaize. Octavio Mey possédait un cabinet d'antiquités fort réputé, que visita Mme de Sévigné, si l'on croit les lettres de cette illustre dame.

    La rue fut agrandie en 1873 pour permettre la joinction du pont La Feuillée à la toute nouvelle gare du quartier Saint-Paul, terminus de la ligne de Montbrison. La carte ancienne ci-dessous offre un panorama du début du vingtième siècle sur la rue.

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  • Imbert-Colomes

    « 1789 : Les Etats-Généraux siègent à Paris. Quinze jours avant la prise de la Bastille, des troubles avaient déjà éclaté entre Rhône et Saône. La crise économique, le chômage, la vie chère, avaient provoqué des bagarres. La réunion des Trois Ordres fut célébrée les 2 et 3 juillet et le soir, & pour la première fois, on entendit des groupes d'ouvriers, des femmes, des enfants, hurler : "A bas les calotins, A bas les aristocrates." Il y eut des jets de pierre sur les maisons qui n'étaient pas illuminées, et on cria beaucoup devant l'hôtel du Premier échevin, Imbert-Colomes. »
    J'emprunte ce paragraphe d'introduction à André Mure, dont "Le roman de Lyon" (Ed du Cuvier, 1958), narre en la romançant l'histoire de notre ville. Jacques Imbert Colomes y joua, durant la Révolution, un rôle trouble et fort ambigu.

    Il était alors Premier échevin, il fut aussi Commandeur de la Ville. Tout en se déclarant en faveur des idées nouvelles, il parut au peuple plus soucieux de conserver ce qui était sauvable au sein de l’ordre ancien. Il regroupa autour de lui tous les fils de familles (banquiers, fabricants, commis, au nombre de huit cents) pour constituer ce qu'il appelait sa garde d'honneur - dans la ville on les appelait les muscadins -afin, déclara-t-il, de protéger la cité et ses richesses des bandes de pilleurs venus des campagnes qui, profitant des événements, rodaient la nuit. Il réprima ainsi ce qu'on appela "la Grande Peur". On lui reprocha beaucoup d'avoir créé ce corps autonome et soumis à son propre commandement, plutôt que de l'avoir incorporé à la milice bourgeoise qui, par ailleurs, avait également mission de protéger les habitants. Des rivalités se firent jour entre les bourgeois de la milice et les muscadins du Premier échevin. Des escarmouches violentes opposèrent également les gens du petit peuple avec les muscadins. Le 13 octobre 1789, il y eut des blessés & de nombreux cris de morts furent poussés contre lui. Très affecté, Imbert-Colomes proposa sa démission, mais l'assemblée des échevins le supplia de rester. Ce qu'il fit.

    Mal lui en prit. Au cours d'une altercation plus violente autour de l'Arsenal le 7 février suivant, il dut s'enfuit de façon romanesque de sa maison rue Saint-Catherine, en filant par les toits pour échapper à la vindicte populaire. Et comme il était parvenu à sauver sa peau, les Suisses laissèrent faire la populace qui pilla, dévasta la demeure du dernier des premiers échevins de Lyon. D'Annonay puis de Loriol où il se cachait, il participa à plusieurs complots royalistes, avant d'émigrer en Russie avec un prêtre réfractaire de Mions. Ce qui restait de ses biens fut confisqué, et il ne put obtenir la levée du sequestre avant 1797. De retour à Lyon cette année-là, il se fit élire au Conseil des Cinq-Cents le 23 germinal an V (1797) par 131 voix sur 175 votants. Toutefois, agent secret au service des Bourbons, lié au club de Clichy, il s'opposa au Directoire et se retrouva condamné à la déportation lors du coup d'État du 18 fructidor an V. Il dut à nouveau s'exiler : tous ses biens, notamment son cabinet d’histoire naturelle et ses tableaux, furent alors dispersés.

    Impliqué par Fouché dans une conspiration d'émigrés à Bayreuth, il fut arrêté par les autorités prussiennes, à la demande du gouvernement français, puis enfermé dans la haute citadelle de Bayreuth. Libéré, il put en 1807 traverser la Manche jusqu'en Angleterre et s'installer à Bathwick-upon-Avon, dans la ville de Bath, dans le Somerset. C'est ici-même qu'il mourut, en attendant de se présenter devant Louis XVIII.

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    Lorsque l'architecte Dardel, en 1843, ouvrit cette voie située au centre des pentes de la Croix-Rousse (1er arrondissement), la Monarchie de Juillet décida de réhabiliter la mémoire du dernier échevin de Lyon (1729-1809) en la baptisant de son patronyme, seule trace encore visible entre Rhône et Saône du passage ici-bas de cette existence, ô combien romanesque !

  • Basses Verchères

     Voici un nom pour le moins curieux. C'est une ruelle du cinquième arrondissement de Lyon, dans le quartier de Trion, sur la colline de Saint-Just, connue depuis 1740. Verchère est un mot du vieux langage, par laquelle on désignait une terre placée directement en dépendance d'une maison. Dans de très anciens textes, on trouve vercaria, ou vervaria. Ce terme est une corruption du latin vervex, brebis. De là vervicaria, terre pour brebis. Les basses verchères seraient donc tout simplement des pâturages. Vers 1827, trente quatre métiers à tisser battaient dans les immeubles bas de cette rue, comme quoi ce n'était pas le privilège de la Croix-Rousse que d'héberger des canuts.

    A l'angle de la rue des Basses Verchères et de celle des Anges se trouve une très jolie petite statue de la Vierge Immaculée, moins connue que beaucoup d'autres, bien que d'un charme tout autant gracieux. Ces Madones des rues sont nombreuses à Lyon, signe de l'ancienne piété des lyonnais. Mais les passants d'aujourd'hui préfèrent regarder les vitrines et peinent à lever le nez. La plupart du temps, c'est pitié de voir comme elles sont sales et couvertes de notre pollution. Dans son livre qu'il leur a consacré en 1912, André George en dénombre plusieurs centaines. Les anciens Lyonnais les plaçaient là, à l'angle de leurs voies, pour protéger tout autant leur maison que leur maisonnée. Tout cela rappelle à quel point Lyon est une ville mariale, depuis le vœu des échevins de 1643, et même avant, car pourquoi ces échevins auraient-ils été prier Marie qu'elle sauvât leur cité de la peste, si son culte n'y avait pas déjà été, et depuis longtemps, fermement implanté ?

    Ce petit ilot de Trion est un peu un havre de paix qui a su garder un certain charme, je l'avoue. Très empruntée par des automobiles, la montée de Choulans, sur laquelle la rue des Basses Verchères vient rendre l'âme, déverse son flot d'indifférents vers Perrache et le centre ville. Lorsque plus rien ne circule, on entend quelques oiseaux.

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  • Baleine (rue et place)

    De vieilles légendes prétendent que le nom de cette petite rue et de cette place du Vieux Lyon provient d'un os de cétacé qu’on aurait découvert dans le sol. Voit-on sérieusement une baleine, remontant de Marseille tout le courant du Rhône jusqu’à venir crever dans la vieille capitale des Gaules ? Et comment se serait-elle conservée de l’époque préhistorique jusqu’au moyen-âge, pour finalement être soudainement découverte à l'occasion d'une fonte des glaces assez surréaliste. Mieux vaut donc se ranger donc de l'avis de Robert Brun de la Vallette, qui rappelle qu'une enseigne figurant un dauphin se trouvait autrefois sur la place du Grand-Palais. Il explique que le dauphin figurait dans les armoiries des comtes de Forez, dont la résidence était à proximité. La confusion entre le dauphin et la baleine explique donc l'adoption de ce nom par les vieux Lyonnais.

     

    En 1827, on comptait 21 métiers à tisser place de la Baleine, et 8 dans la rue. Très vite, les canuts allaient cependant quitter ce quartier pour émigrer vers la Croix-Rousse, son plateau et ses pentes. Dans son dictionnaire, Louis Maynard précise que Claude Bellièvre habita au n°1 de la place. Non loin de là se trouvait le port de la Baleine, un lieu très vivant, et trop souvent dévasté par les crues de la Saône. Ce n’est pas très loin de là, d’ailleurs, que Laurent Mourguet, devenu saltimbanque à cause du chômage, donna ses premiers canevas guignolesque après la Révolution. Cette petite rue, qui part du quai Romain Rolland et permet de rentrer dans le Vieux Lyon, est aujourd'hui piétonne.

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  • Terme

    La rue Terme se trouve dans le premier arrondissement de Lyon. Formée de deux tronçons distincts, elle portait auparavant dans sa partie basse le nom de petite rue Sainte Catherine, dans sa partie haute celle de place Neuve des Carmes. Sur cette place se tenait jadis le marché au fil.

    Né en 1791 dans une famille de négociants lyonnais, Jean François Terme fut l'élève des Pères de la Foi à Belley, où il fut le condisciple de Lamartine. Il avait devint en 1830 l'adjoint du maire Prunelle, et fut l'un des fondateurs du journal Le Précurseur. Il fut nommé maire de Lyon le 30 octobre 1840 et le demeura jusqu'à sa mort. Il fut également député de l'arrondissement de Villefranche. C'est sous son administration que fut installé l'éclairage au gaz, et que l'on commença à remplacer les légendaires cailloux ronds de Lyon par des pavés plats. Il fit ouvrir la rue Bourbon (à présent Victor Hugo) et se distingua par son dévouement lors des inondations de 1840. A l'Hôtel-Dieu, c'est lui qui remplaça les dalles de pierre par des parquets. Docteur en médecine de la faculté de Paris, il avait renoncé à exercer après avoir été impuissant à arracher son frère à la mort; mais il soigna ses amis et devint une sorte de médecin des pauvres, qu'il assistait gratuitement.
    Le docteur Terme est mort à l'Hôtel de Ville, où il logeait, le 8 décembre 1847, après une maladie de sept jours. Ses contemporains lui firent d'imposantes funérailles, et la rue porte son nom depuis 1862. C'est à ce maire qu'on doit l'idée de récompenser, en quelque sorte, les grands Lyonnais de façon posthume en leur accordant des noms de rues : il fut en contrepartie le fossoyeur de nombreuses appellations pittoresques et populaires, porteuses de mémoire populaire.

    Le premier funiculaire au monde porta son nom : dès le 3 juin 1862, en effet, une ligne allant de la rue Terme au boulevard de la Croix-Rousse y fut ouverte. Ce fut un succès autant technique que populaire, jusqu'au 31 décembre 1967, date de sa fermeture. Le tunnel percé à l'occasion est aujourd'hui ouvert à la circulation automobile.

     

    Ci-dessus, une carte postale ancienne montre l'entrée de l'ancienne gare.

     

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