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  • Clair Tisseur

    C’est en 1927 que, sur proposition d’un conseiller nommé Rognon (cela ne s’invente pas), la municipalité décida de faire un geste discret en faveur de Clair Tisseur. Discret : c’est le moins qu’on puisse dire ! En lui accordant cette rue du septième arrondissement minuscule et jadis sans nom, une rue d’ailleurs sans rapport non plus avec lui , qui naquit le 27 janvier 1827 au 34 de la rue Grenette, fit ses études au collège des Minimes puis aux Beaux Arts (sous la img1454.jpgdirection d’Antoine Chenavard), résida Quai Monsieur (à présent Quai Gailleton) tint cabinet d’architecte au 10 rue de la Reine (aujourd’hui rue Franklin), mourut dans sa maison de Nyons le 30 septembre 1895 et fut enterré à Sainte-Foy-lès-Lyon… Tandis que Clair Tisseur construisit les églises Sainte Blandine (2ème) et du Bon Pasteur (1er) la mairie deuxième arrondissement, Nizier du Puitspelu fut l’écrivain à la fois moraliste, humoriste, l’érudit considérable que l’on sait. Les Vieilleries Lyonnaises (1879), Les Oisivetés du sieur Puitspelu (1883), Le Littré de la Grande Côte (1894), Les Coupons d’un Atelier Lyonnais (posthume) bien sûr, mais également un roman, André (1868), un recueil de poésies, Pauca Paucis (1889), un recueil de réflexions (Au hasard de la pensée, 1895). Nizier du Puitspelu ! L’étonnant pseudonyme, quand son propre nom, Clair Tisseur évoquait si bien la ville qu’il a tant aimée ! Nizier, en hommage au quartier Saint-Nizier, et Puitspelu, en souvenir d’un vieux puits qui exista en effet dans le prolongement de l’actuelle place de la République.

    Pour ses successeurs, Puitspelu fit office de patriarche, de fondateur, de maître à penser. Il initia L’Alme et Inclyte Académie du Gourguillon « à seule fin de préserver toute vieille bonne tradition lyonnaise ». Alme, précise-t-il, du latin almus, signifie nourricier ; inclyte, de inclutus, célèbre. « L’an de grâce mil huit cent septante-neuf et le vingt-quatrième de juin, jour de la Saint-Jean, à quatre heures de relevée, notre sieur Nizier du Puitspelu, bras-neufs de sa profession, se chauffant le ventre au soleil et parlant à sa propre personne, déclara fondée l’Académie du Gourguillon. Il en fut aussitôt le président, le vice-président, le secrétaire, le trésorier, les membres et le public » : Ce qui n’aurait pu être qu’une plaisanterie devint, au fil du temps, un repaire de bons et truculents Lyonnais soucieux de recueillir tout ce qui disparaissait du paysage et des mœurs. Clair Tisseur inspira véritablement un mouvement artistique qui se prolongea durant toute la première partie du XXème siècle, regroupant en son sein des écrivains (Bleton, Béraud, Lavarenne, Sambardier) des peintres (Combet Descombes), des politiques (Salles, Godard), et propageant véritablement un esprit très Troisième République durant la longue présidence d’Edouard Herriot.

    Je crois pour ma part, de ce que j’ai lu et appris de lui, que Puitspelu fut avant tout un doux. J’en veux pour preuve cette pensée de lui, que je laisse en guise de conclusion et d’hommage tout en même temps :
    « Peut-être que cet amour de la solitude, si marqué en mon humble personne, n’est au fond que le désir d’éviter toute contradiction. La contradiction étant le fond de la société. »

     

     

     

  • Fulchiron

    Les paysages de maisons baignant dans la Saône ont totalement disparu du Lyon moderne. Mais durant des siècles, de Vaise à Ainay, ils étaient monnaie courante. Ainsi, le quai qui longe le vieux quartier Saint-Georges, aujourd’hui nommé quai Fulchiron, a longtemps présenté cet aspect, le clapotis de la rivière léchant l’alignement des fondations de ses maisons, interrompu à distance régulière par de charmants bas-ports vénitiens. Un bâtiment au chevet imposant, la Commanderie Saint-Georges, se distinguait tout particulièrement. Les Chevaliers de Malte l’avaient fait bâtir peu après leur installation dans le quartier Saint-Georges vers 1315. Elle avait été reconstruite, ainsi que l’église attenante, en 1498, par le commandeur Humbert de Beaufort. Vers 1830, l’architecte Layat transforma l’imposant bâtiment en un immeuble à l’intention des ouvriers tisseurs.

    La construction d’un quai à cet endroit fut chose fort délicate, en raison de nombreuses constructions historiques. On songea d’abord à un projet implanté dans le lit de la rivière, mais on finit par adopter, le 12 octobre 1838, l’alignement au fil, nécessitant la démolition de nombreuses maisons. Le quai fut construit de 1840 à 1861. Un incendie (peut-être opportun) ayant détruit en 1854 les deux tours rondes baignant dans la Saône, la vieille Commanderie fut complètement rasée pour permettre la création du quai.

    D’une famille de marchands de soie originaire de Saint-Chamond, Jean Claude Fulchiron (1774-1859) naquit à Lyon, dans la maison paternelle, au 2 rue Mulet. Aux premiers jours de la Révolution, il était élève au collège de Plessis (aujourd’hui Louis Le Grand) à Paris. La suppression de l’Université le ramena à Lyon, chez son père. Il fit partie des levées de la Convention et devint sous lieutenant. C’est alors qu’il se lia d’amitié avec Casimir Périer, le futur ministre de Louis Philippe. Il fut élève de Polytechnique en 1795. Il quitta l’armée deux ans plus tard pour tenter une carrière littéraire.

    Fulchiron composa plusieurs tragédies aujourd’hui bien oubliées.

    On le retrouve en 1831, député du Rhône jusqu’en 1845. C’est à ce titre qu’il put contribuer au financement du quai qui porte à présent son nom, par décision du Conseil du 10 mai 1838, et ce « à perpétuité ».

    Fulchiron devint pair de France en 1845. Il mourut à Paris en 1859, à l’âge de 85 ans.

     

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  • Paul Bert

    Le troisième arrondissement de Lyon est décidément un arrondissement attaché à la laïcité, si l'on en croit, du moins, le nom de ses rues. Après Ferdinand Buisson voici Paul Bert. Licencié en droit (1856) et en sciences naturelles (1860), docteur en médecine, Paul Bert est devenu, en 1863, préparateur de Claude Bernard au Collège de France. C'est l'une des figures les plus anticléricales de la deuxième partie du XIXème siècle, qui alla jusqu'à faire inscrire sur sa stèle funéraire « Science » et « Patrie» En 1866-1867, il enseigne la zoologie et la physiologie à la faculté des sciences de Bordeaux. De retour à Paris l'année suivante, il remplace Flourens à la chaire de physiologie comparée au Muséum d'histoire naturelle. En 1869, il succède à Claude Bernard à la Sorbonne. La guerre de 1870 l'oriente vers la politique. Nommé préfet du Nord par son ami Gambetta, il est élu député de l'Yonne (1872) et devient, en 1881-1882, ministre de l'Instruction publique dans le cabinet Gambetta. La mémoire collective oublieuse lui doit le certificat d'étude primaire, conçu pour que tous les français sachent lire, écrire et compter. Paul Bert incarne cet idéal que les 1157473441.jpglois de Jules Ferry sur l'enseignement primaire (laïque et obligatoire), sur l'admission des jeunes filles dans le secondaire et sur l'introduction des sciences dans l'enseignement ont porté très haut. Il publie en 1881 L'Enseignement laïque, suivi de plusieurs manuels primaires et secondaires sur les sciences physiques et naturelles. Il édite La Revue scientifique, de 1879 à 1885. Par suite des difficultés rencontrées par la colonisation française en Indochine, Paul Bert est nommé en janvier 1886 gouverneur civil de l'Annam et du Tonkin. Il remplace les militaires par des administrateurs civils, fonde des écoles, négocie avec les autorités locales. il meurt à Hanoï en 1886. Un an plus tard, la municipalité de Lyon décide d'attribuer son nom à cette longue artère du troisième arrondissement en réunissant les rues de Chartres et du Sacré-Coeur lesquelles n'étaient, autrefois, qu'un long chemin reliant Lyon à Villeurbanne. Je crois que la rue Paul Bert fut l'une des dernières rues de Lyon où l'on trouvait des menus à l'assiette, formule économique des anciens restaurants ouvriers

  • Deux-Amants

    La dénomination provient d’un tombeau, dit des Deux Amants, situé sur la propriété des sœurs de Sainte-Elisabeth, laquelle appartient à présent au conservatoire de musique, quai Chauveau. Elevé en forme d’autel entre les deux portes de Lyon et de Vaise, il fut détruit en 1707, car il menaçait de tomber en ruine. Tant de légendes circulèrent à propos de ce tombeau qu’on chercha, à l’occasion de sa démolition, si on ne pouvait rien découvrir, dans le terrain qui l’abritait, des traces susceptibles de confirmer l’une d’entre elles. La plus extraordinaire prétendant que ce tombeau serait celui du roi Hérode et de son épouse Hérodias, qui seraient venus finir leurs jours à Lyon, sur l'ordre de Caligula. C'est Flavius Josèphe, un historien juif d'expression grecque, né vers 37/38 et mort après 100, qui donna à cette légende une sorte de crédit historique dans son Histoire ancienne des Juifs, qui fut traduite en latin au VIème siècle : Caligula vient de convoquer, Hérode accusé d'avoir comploté contre lui :


    2135340410.jpg"Caligula était bouleversé et demanda à Hérode si ce qu'on disait des armes était vrai. Hérode répondit par l'affirmative sur l'existence des armes, car il lui était impossible de dire autre chose, sauf à contredire la vérité. Caligula pensant que les accusations de rébellion étaient fondées lui retira sa tétrarchie, qu'il ajouta au royaume d'Agrippa. Il condamna Hérode à un exil perpétuel, lui assignant comme résidence la ville de Lyon en Gaule. Ayant appris qu'Hérodiade était la sœur d'Agrippa, il lui rendit tous les biens qui lui appartenaient en propre et lui dit de penser que, si elle ne partageait pas le sort de son époux, elle le devait la protection de son frère. Mais elle répondit : Prince, tes paroles sont d'une âme élevée et conviennent à ta dignité. Mais l'amour que j'ai pour mon mari m'interdit de profiter de ce cadeau bienveillant. Il serait injuste, après avoir pris part à son bonheur, de l'abandonner dans le malheur.

    Mis en colère par cette grandeur d'âme, Caligula la fit exiler aussi, avec Hérode. Et il donna sa fortune à Agrippa. Tel fut le châtiment que Dieu infligea à Hérodiade pour la jalousie qu'elle portait son frère, et à Hérode pour avoir écouté des bavardages de femme."


    Venir mourir Lyon, châtiment divin infligé à Hérode pour avoir écouté Salomé et lui avoir offert la tête de Jean-Baptiste, voilà qui donne une piètre image de cette ville ! mais la fidélité d'Hérodiade rachète un peu l'affaire, en tous cas justifie la légende des deux amants.
    Depuis que « l'autoroute du soleil » traverse la ville, la rue des Deux-Amants, qui se trouve à l'entrée du tunnel de Fourvière dans le neuvième arrondissement, n'a plus de poétique que son nom. Dans certains cas, cela suffit.

  • Challemel-Lacour

    Paul Armand Challemel-Lacour est né à Avranches, en Normandie, le 19 mai 1827. Ancien élève de l'Ecole normale supérieure, il fut reçu premier à l'agrégation de philosophie, et se fit connaître comme un ardent républicain durant tout le Second Empire.

    Exilé en Suisse jusqu'à l'amnistie de 1859, il y a exercé la fonction de professeur de littérature française au Polytechnicum de Zurich. Revenu en France, il fut auprès de  Gambetta le co-fondateur de la Revue politique en 1868. Nommé préfet du Rhône après le 4 septembre 1870, il a vu son autorité combattue à la fois par la municipalité lyonnaise (qui revendiquaient l'autonomie confisquée par son prédécesseur Vaisse) et par les conservateurs qui l'accusaient de manquer d'énergie face au comité de salut public.

    Contesté par la Commune de Lyon qu'il réprima violemment, il est démissionnaire le 5 février 1871. L'année suivante, on le retrouve élu représentant des Bouches du Rhône à l'Assemblée Nationale, avant de siéger de 1876 jusqu'à sa mort comme sénateur de ce département, parmi les républicains de gauche. Il réalise ensuite une brève carrière d'ambassadeur (Berne en 1879, Londres en 1880), puis devient un éphémère ministre des Affaires-Etrangères dans le cabinet de Jules Ferry.

    Challemel -Lecour a été président du Sénat et académicien (il prit la place d'Ernest Renan le 23 mars 1893) durant les trois dernières années de sa vie. Considérant que l'esprit radical avait engendré en France une forme d'anticléricalisme détestable, il prôna à la fin de sa vie des pratiques plus modérées, des opinions plus consensuelles. Il mourut le 26 octobre 1896.

    Challemel Lecour est l'auteur d'une Histoire de la philosophie en cinq volumes, publiée chez Ritter en 1861 et d'un travail sur Schopenhauer (Etudes et réflexions d'un pessimiste, Paris ; 1901).

    De la rue Marcel Mérieux à la route de Vienne, la rue Challemel-Lecour traverse le septième arrondissement de Lyon. Ci-dessous, une caricature d'époque.

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  • Rabelais

    Les séjours deFrançois Rabelais à Lyon ne se comptent pas. Il est probable que la première fois qu'il y vint, ce fut pour chercher un refuge : en 1524, le supérieur du couvent franciscain de Fontenay-le-Comte, où il était moine, lui créa de gros ennuis parce qu'il étudiait le grec. Son séjour le plus long fut celui qu'il fit à partir de 1531, durant lequel il édita chez Sébastien Gryphe, plusieurs ouvrages d'érudition, notamment les Aphorismes d'Hippocrate, d'après un manuscrit grec dont il avait eu connaissance à Montpellier. En 1532, il est nommé médecin au Grand Hospital du Pont du Rosne, avec des appointements de quarante livres par an. C'est alors qu'il fait paraître Pantagruel, au mois de novembre, chez Claude Nourry qui habitait près de N.D. de Confort. Il est obligé de quitter Lyon au début de 1535 et se réfugie auprès de son protecteur, l'évêque de Maillezais.

    On raconte qu'alors, frappé de fâcheuse impécuniosité au moment de se rendre à Paris, Rabelais imagina l'expédient suivant : il fit écrire par un enfant des étiquettes placées sur des sachets, portant les mots : poison pour le roi, poison pour la reine, poison pour le dauphin. Dénoncé par ses soins, il fut arrêté et conduit à Paris devant le roi au frais de l'Etat. Il se disculpa aisément alors en avalant le contenu parfaitement inoffensif des trois sachets. Véridique ou non, l'histoire a longtemps circulé sous le nom du quart d'heure de Rabelais, pour souligner l'art de se tirer d'affaire sans bourse délier.

    Troisième et dernier séjour en 1538. Il a conquis entre temps ses grades universitaires, il est docteur et fait à Lyon sa célèbre leçon d'anatomie sur le cadavre d'un pendu. Mais il est stupidement inquiété par le cardinal de Tournon qui songe le faire emprisonner et doit fuir une fois de plus précipitamment.

    En 1855, on donna à une rue de la Paix, sise dans le troisième arrondissement,  le nom de François Rabelais. Certains s'émurent que cette rue se trouvât loin de l'Hôtel Dieu, mais la commission de l'époque fit valoir que François Rabelais étant davantage honoré en tant qu'écrivain national que médecin, cette proximité n'avait nulle importance.

    Aux alentours de 1880 on trouvait encore un cabaret au nom pittoresque au 31 de la rue de Maîstre Alcofribas Nasier, "Le Guignol ronflant". En voici une description faite par le journaliste lyonnais Bernard Frangin (Bistrots de Lyon, histoire et légende) : « Assassins et filles s'y réfugient dès potron-minet pour se refaire de leurs méfaits nocturnes. Le tavernier, un certain Roux, leur compte un sou de l'heure pour dormir devant une table. A l'entrée, un judas invisible permet d'ouvrir la porte aux seuls habitués montrant patte blanche. L'arrière-cour abrite un puits bidon, autorisant une fuite discrète et rapide au cas de descente de police inopinée. Cela sous couvert d'une réclame de bon aloi : Café-restaurant - cuisine ménagère à emporter- on vend à la portion ».

    L'enseigne du Guignol endormi n'est donc évidente que pour les seuls initiés.
    Aujourd'hui, rien n'est plus banal que cette rue dont on songe, en la parcourant, que le maître des lieux et sa dive bouteille auraient mérité une artère autrement divagante : ces façades bourgeoises, alignées sans la moindre originalité, et où s'abritent les notables, n'ont en effet que peu de choses à voir avec celui qui écrivit « je ne construis que pierres vives » et nous offrit tant de mots célèbres, bons et truculents. A lui, donc, le mot de la fin :

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    Le grand Dieu fit les planètes et nous faisons les plats nets.

    (François Rabelais / Pantagruel / 1532)

  • Herbouville (cours)

    Après la création du quartier Saint-Clair au XVIIIème siècle, la route qui longeait le Rhône au pied de la colline de la Croix-Rousse prit le nom de chemin Rater, du nom d'un des architectes qui construisait ce nouveau quartier (né à Lyon en 1729, mort à Miribel en 1794). Puis le nom de chemin deSaint-Clair a prévalu. Cette voie suivait grosso modo l'antique voie romaine allant à Miribel et ouverte par l'ordre de l'empereur Claude.

    Le marquis d'Herbouville, préfet du Rhône de 1806 à 1810, pair de France, naquit en 1736 à Paris, où il mourut le 1er avril 1829. Il succéda, en tant que préfet du Rhône, à Bureau de Puzy, et fut lui-même remplacé par le comte de Bondy. C'est parce qu'en 1807, il fit construire le glacis le long du Rhône et planter la double rangée d'arbres qui fit de cette avenue l'une des plus belles promenades du Lyon d'alors qu'on lui attribua son propre nom. Force est de reconnaître que voilà un lieu dont la circulation automobile aura littéralement pulvérisé la beauté ! Pollué et bruyant, le cours d'Herbouville, à présent transformé en voie rapide, n'a hélas plus aucun intérêt pour le promeneur solitaire ou non.

    C'est sur ce cours que s'ouvrit, sous la Restauration, la brasserie Gayet, qui fut fameuse pour avoir servi en 1829 un banquet à La Fayette et ses cinq cents invités. Quinze fenêtres cintrées donnant sur le quai, une terrasse de soixante mètres de long, ornée d'orangers et faisant suite à la salle qui contenait cinq rangs de tables de marbres blancs où pouvaient s'asseoir sept cents personnes et où logeait un orchestre entier : La brasserie Gayet soutint cette réputation jusqu'à l'implantation de la gare de Perrache, qui déplaça autour d'elle l'entrée dans la ville des voyageurs. Non loin de la, une compagnie de bateaux à vapeur avait son embarcadère : 5 francs la croisière jusqu'aux grottes de la Balme, à 45 kilomètres de là.

    Au vingtième siècle, le cours d'Herbouville fut célèbre pour deux raisons : au n° 1 se trouvait le logement du maire de Lyon, Edouard Herriot, celui que Béraud avait baptisé « le Péricles du cours d'Herbouville » en raison de sa volonté de transformer totalement le tissu urbain de Lyon, pour le meilleur comme pour le pire. C'était , « au deuxième et dernier étage d'une maison du dix-neuvième siècle, adossée à la colline avec vue sur le Rhône et le parc de la Tête d'or, les îles du haut fleuve verdoyantes de vorgines, la plaine dauphinoise, une demeure simple », nous confie Pétrus Sambardier (« Le président Herriot intime », dans La vie à Lyon, 19 ). Un médaillon gravé sur la porte en bois du 1 cours d'Herbouville rappelle au touriste égaré là le passage de cet illustre habitant.

    L'autre raison fut plus dramatique : le 8 mai 1932, deux ans après la catastrophe de Fourvière, une partie de l'autre colline de Lyon, celle de la Croix-Rousse, s'abima dans un éboulement soudain qui causa la mort de 27 personnes. Moindre fut sa réplique en 1977. Sur ces deux cartes postales, on peut voir l'immeuble du 51-52 cours d'Herbouville tel qu'il était avant le glissement de terrain, avec en son rez-de-chaussée une manufacture de vêtements, et ce qu'il en resta après. Au loin, une vue sur le Pont de la BOUCLE, lui aussi disparu du paysage depuis 1981, en raison de l'étroitesse de sa chaussée et de l'acharnement de nos maires contre les ponts lyonnais.

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