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Militaires - Page 2

  • Carnot (place)

    D’après l’ingénieur Perrache qui aménagea le quartier qui à présent porte son nom, la place Carnot aurait dû initialement s’appeler la place du Lycée, en hommage à Aristote. Au lieu de ça, on l’appela tout d’abord place des Victoires durant tout le Premier Empire. C’était alors une espèce de terrain vague à pleine remblayé, promis aux marchés aux chevaux alors surnommés «charabarat ». Ce mot signifiait à l'origine caquetage bruyant, verbiage. Il provient du provençal charra, caqueter. L’idée de charabarat est donc celle de réunion bruyante. Dans ses Oisivetés du sieur Puitspelu, Clair Tisseur consacre un chapitre entier à ces anciens marchés. Un des vices rédhibitoires, y apprend-on, c’est le cornage : « Un cheval est dit cornard lorsqu’il souffle bruyamment en respirant et qu’il a l’haleine courte. ». Autrement dit, un cornard ne vaut que dix pistoles là où un cheval sain vaut quarante écus.

    Lorsqu’il n’y avait pas marché, l’autre événement qui s’y tenait était les exécutions capitales. Aménagée véritablement durant la Restauration, elle prit le nom de Louis XVIII. Écoutons Puitspelu : « Au temps que l’on exécutait sur la place Louis XVIII, on n’avait pas les précautions de décences que l’on a maintenant, et les exécutions se faisaient au grand soleil. J’étais tout enfant que l’on guillotina deux individus en même temps. C’était l’été. Comme, sur la place, il n’y avait que les maisons basses du côté Saône, et point sur le cours du Midi, on voyait très bien de Saint-Foy et la place et la guillotine que, dans la matinée, l’on était occupé dresser. Peu à peu, une grande foule s’assembla et, vers une heure, vint le cortège fatal. On avait la maison une grande lunette montée sur un pied à laquelle, dans ma curiosité d’enfant, je tenais l’œil collé. Malgré la distance, je vis assez distinctement et le bourreau saisir le condamné, et tomber la tête. Mes genoux défaillirent, mes yeux se troublèrent, je me mis à trembler de tous mes membres et n’eus nulle envie de chercher à voir la seconde exécution. On appelait au même instant pour se mettre à table. Ce contraste me fit je ne sais quelle impression terrible. Je ne pus manger. Ce souvenir est resté profondément gravé dans ma mémoire d’enfant. »


    L’hiver, la place était inondée et souvent gelée : elle servait donc de patinoire aux gens du petit peuple. Des baraquements de forains s'y tenaient au printemps. Lors de la Révolution de 1848, la place Louis XVIII abrita brièvement une effigie du peuple souverain ; sous le Second Empire, elle devint « place Napoléon », et le monument du peuple souverain fut remplacé par une statue équestre de Napoléon 1er, de 1854 à 1872. Après Sedan et la chute delazare_carnot-1753-1823.jpg Napoléon III, elle devint plus simplement la « place Perrache ». C'est à l’occasion du centenaire de la Révolution, qu'elle reçut en 1889 le nom de place Carnot qu'elle porte encore aujourd'hui: il s’agissait de Lazare Carnot, le grand-père du président Sadi, élu alors depuis tout juste deux ans; ce dernier vint inaugurer, l’année du centenaire, une allégorie de la Révolution, dite aussi de la République, lors de son premier voyage à Lyon. On sait que son second, quelques années plus tard, lui fut fatal. Cette place demeura en état les deux premiers tiers du vingtième siècle en formant avec la place Bellecour et la place des Terreaux un bel ensemble. De l'esplanade de la gare, elle offrait au nouvel arrivant une perspective digne de la troisième ville de France. Survint alors le maire Pradel : Une gare routière, ingénieusement installée entre la gare de Perrache et la place Carnot défigura dès lors de façon abominable cet endroit, qu’une autoroute, pour parachever le sabotage, traverse par ailleurs. Sur cette place depuis peu se tient chaque année un marché de Noël, version touristique et moderne des très populaires marchés aux chevaux, charabarat des temps jadis.

  • Général Sève

    La rue Général de Sève, au coeur du quartier des tisseurs, à la limite entre le premier arrondissement et le quatrième rappelle le souvenir d'un être d'exception qui fut peut-être le plus courageux et le plus indiscipliné de tous soldats de la Grande Armée. Fils d'un tondeur de drap marié à une brodeuse, petit fils d'un paysan du Bugey, il naquit à Lyon un 11 (ou 19 ?) mai 1788. Sa vie laissa à ses biographes le souvenir d'un roman. Il s'engagea très tôt dans la Marine, combattit à Trafalgar, s'engagea ensuite dans un régiment de hussard et participa aux campagnes napoléoniennes : Italie, Allemagne et Russie (1812-1813). Il eut plusieurs fois son cheval tué sous lui, notamment à la Bérézina. Lorsque Napoléon l'appela afin de lui remettre la Légion d'Honneur, Sève lui dit : "Si Votre Majesté n'avait pas autre chose à le mire, ce n'était pas la peine de me déranger." Et, lui tournant le dos, il laissa l'Empereur et son entourage suffoqués.
    Après le départ de Napoléon à Sainte Hélène, la Restauration -Louis XVIII- ne lui apporta rien de bon. Il démissionna de l'armée, reprit sa démission, demanda "la jouissance de la demi-solde...", sollicita de ses supérieurs l'autorisation de se marier. Il prit à bail une ferme, se lança dans le commerce de location de chevaux et voitures. Il eut des ennuis avec son propriétaire qui l'expulsa. Il fit des dettes ... Enfin un jour après avoir liquidé ses quelques biens, il partit pour Lyon accompagné d'une jeune modiste, Eulalie Virginie Champy.

    635910047.jpgMais la famille ne réserva pas à cette fiancée l'accueil que Joseph espérait. Il trouva alors dans la fuite le remède à sa situation et partit s'installer à Milan comme représentant d'une maison de commerce lyonnaise. On le retrouve un peu plus tard en train de se présenter, sur la recommandation du Comte de Ségur, comme Colonel Sève, à Méhémet Ali, alors vice-roi en Egypte. Celui-ci voulait créer une armée et une flotte. Il plaça l'ancien membre de la Grande Armée, pour cette mission, aux côtés de son fils Ibrahim.
    Au début de son séjour en Egypte, les mamelucks projetèrent de l'assassiner. Lors d'un tir, ils tournent leurs armes contre lui, et le manquent. Le Général alors se précipite sur eux, les frappent de sa cravache, leur reprochant de manquer un homme de si près ! Et leur ordonne de recommencer : une telle témérité enthousiasma ses hommes et il les conquit à jamais.

    Grâce à une flotte bien équipée, cette armée nouvelle va se retrouver en Grèce (1824-31), pour affronter les Turcs qui se retireront vers les Dardanelles. Elle conquerra le Péloponèse. Puis, après avoir été décimée par le choléra et s'être retirée à son tour, elle s'élancera, en 1832, dans une campagne contre le Pacha d'Acre en Palestine. Elle investira Alep et remportera la victoire de Konia. Enfin en 1839 ce sera la victoire de Nezib sur les troupes turques, victoire capitale qui fut un tournant dans l'histoire de l'Égypte. Au fur et à mesure des années, Joseph Sève se convertit à l'Islam, prit le nom de Soliman. Il épousa Sidi Maria Myriam Hanem appelée "la Grecque" qu'il avait enlevée à un commerçant du Péloponèse. Elle lui donna trois enfants : deux filles, Nazli, l'aînée, grand mère de la reine Nazli mère du roi Farouk, Aasma et un garçon Mahadi. C'est ainsi que le général Sève fut, sous le nom de Soliman Pacha l'arrière grand-père maternel du roi Farouk. Il s'éteignit au Caire le 12 mars 1860, terrassé par une crise de rhumatisme aigu. Il fut inhumé dans un mausolée, qu'on peut voir dans le quartier dit "Vieux Caire", érigé sur ordre de son gendre Mohamed Pacha Cherif, à la demande de son épouse Myriam qui, elle, devait décéder bien plus tard, en 1896. La photo est de Nadar (vers 1850)

    Pour suivre : un site consacré à  Soliman Pacha.

  • Moncey

    Le cirque Rancy aura bien longtemps dressé sa silhouette massive et biscornue à l’angle de l’avenue de Saxe et de la rue Moncey. L’établissement avait été fondé en 1882 par le célèbre Théodore Rancy (1818 - 1892) et il fut démoli en 1941, pour raisons d’assainissement du quartier, alors qu’il était désaffecté. Au moment de ses heures de gloire, les gradins de ce cirque d’hiver pouvaient accueillir jusqu’à six mille spectateurs.
    moncey_img2.jpgOuverte en 1855, cette rue prit le nom de Bon Adrien Jannot de Moncey, duc de Conegliano, maréchal d’Empire (1754-1842) qui défendit Paris en 1814 et finit gouverneur des Invalides. Ce nom de Moncey provient d'un hameau que sa famille avait acheté, en 1789, au marquis de Cheylard.
     Son père était avocat à Besançon. Contrariant sa famille, il s’évade du collège eès l'âge de 15 ans pour s'enrôlerdans le régiment de Conti-Infanterie où il sert en tant que grenadier jusqu’en 1773. Il rachète deux fois son congé et se livre ensuite à l’étude du droit.

    En 1774, il entre dans la gendarmerie de la garde où il restera jusqu’en 1778. En 1779, on le retrouve sous-lieutenant au corps d’infanterie de Nassau-Siegen. En 1782, il est lieutenant en second et lieutenant en premier en 1785. Le 1er avril 1791, non ce n'est pas une farce, il est capitaine. Lorsque Bonaparte, en 1801, créa l'inspection générale de la gendarmerie, il en confia la direction à Moncey, qui  conserva ce poste jusqu'à la fin de la première Restauration : on super flic, en somme. . Ci-dessus, son blason. Son fils, nous disent ses biographes, est mort stupidement à 25 ans, d'un coup de fusil de chasse.

    C’est dans cette rue que les militants de l’Internationale se réunissaient, chez l’épicier Conchon, et parmi eux  l'anarchiste Albert Richard, compagnon de Bakounine et de Bastelifica. Entre la rue Villeroy et la rue Saint-Jacques, au numéro 34 de la rue, a longtemps existé un cabaret pittoresque, A la femme sans tête. L'enseigne, encastrée sous un balcon, représentait une femme tenant une quenouille et un fuseau.

    Les rues Moncey, Juliette Récamier, des Émeraudes ont absorbé le chemin de la Fusillade où tombèrent les victimes de 1793, ainsi que l’ancien chemin qui allait vers les Charpennes. Ci-dessous, une photo du cirque Rancy.

     

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