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Evénements historiques - Page 2

  • Belfort

    Cette rue située au cœur du plateau de la Croix-Rousse a successivement porté les noms de rue du Chapeau Rouge (en mémoire d'une enseigne) et de rue Saint-Vincent de Paul, de 1855 à 1871. Elle reçut en 1871 son nom actuel en raison de l'héroïque défense de Belfort durant la guerre de 1870-1871. La garnison comptait un grand nombre de Lyonnais : le capitaine Thiers, qui fut député du Rhône, Tibulle Lang, qui fut longtemps directeur de la société de l'enseignement professionnel et de l'école de la Martinière. Au numéro 24 de cette rue s'ouvre l'impasse Gigodot, du nom de l'entrepreneur qui possédait le terrain où elle fut ouverte.

    Il y eut longtemps également une place de Belfort, qui auparavant avait été la place Saint-Vincent de Paul et, avant 1855, la place de la Visitation, en raison des religieuses qui y demeuraient. En 1884, au numéro 2 de cette place fut créée grâce à l'initiative de deux chefs d'ateliers la toute première école de tissage qui fut extrêmement célèbre au début du vingtième siècle dans ce quartier de canuts, dont elle fut un peu le cœur battant. Au commencement, les cours étaient destinés à des élèves nés de parents lyonnais ou français résidant à Lyon, de 14 ans au moins et 16 ans au plus, étai titulaires du certificat d'études primaires. Ils furent doublés par des cours du soir pour les ouvriers et chefs d'ateliers. Véritable et précieux organisme de vulgarisation, cet enseignement accessible à tous était gratuit, avec possibilité de bourses qui « accordées aux élèves les plus méritants et peu fortunés. » A titre d'indication, en 1914, les cours duraient de 8 à 12 heures et de 14 à 18 heures. Ils comprenaient la théorie du tissage (15 heures hebdomadaires), la pratique du tissage, sur métiers à bras et sur métiers mécaniques (24 heures hebdomadaires), le dessin de fabrique et de mise en cartes (3 heures hebdomadaires).

    L'Ecole municipale de tissage et de broderie de Lyon regroupait alors 27 élèves en cours du jour et 432 élèves en cours du soir et du dimanche. Ce dernier chiffre grimpant à 1 067 pour la meilleure année scolaire de l'école : 1926-1927. L'école a fermé ses portes en 1984. C'est dorénavant le lycée Diderot, non loin de là, qui a pris en charge l'équivalent de cette formation spécifique

    Par ailleurs, la place Belfort rend à présent hommage à Marcel Bertone (1820-1942), officier F.T.P. fusillé le 17 avril 1942. L'historien Robert Luc a récemment cité cette lettre de lui, à sa fille, qui vaut bien celle de Guy Moquet à ses parents :

    « Ma petite Hélène. Lorsque tu liras cette lettre ton petit cerveau commencera sans doute à comprendre la vie. Tu regretteras de ne pas avoir à tes côtés ton papa et ta maman. Mon Hélène, tu dois savoir un jour pourquoi ton papa est mort à vingt et un ans, pourquoi il s’est sacrifié, pourquoi il a fait semblant de t’abandonner… Ma petite Hélène, il est deux heures, il faut être prêt. Il faut me dépêcher… Apprends à connaître les raisons pour lesquelles je suis tombé. Apprends à connaître ceux qui t’entourent et juge les gens non d’après ce qu’ils te diront, mais d’après ce que tu les verras faire…Aie l’esprit de sacrifice pour les choses nobles et généreuses. Ne te laisse pas arrêter par les choses qui paraîtront te convaincre que ton sacrifice est vain, inutile… Si dans la vie tu ne connais pas la richesse, console-toi en pensant que là ne se trouvent pas les sources du vrai bonheur. Choisi un honnête travailleur pour mari. Choisis-le généreux, aimant travailler, capable de t’aimer. Ma fille, en pensée, je t’embrasse. On ne nous a pas accordé l’autorisation de nous voir. Peut-être cela vaut-il mieux ? Adieu Hélène, ton papa est mort en criant : «Vive la France»
    Fait à la prison de la Santé, le 17 avril 1942, date de mon exécution. Marcel Bertone.
    Ne baisse pas la tête parce que ton papa est fusillé. »

  • Mail

    Rue du Mail, rue du Jeu de Mail, il en existe un certain nombre en Provence ou dans la vallée du Rhône, notamment à Nîmes. Le mail était un jeu fort répandu sous l’Ancien Régime. Sorte de cricket, il envahit toute la France au XVIIème siècle et l’on vit même la création d’un corps de « maitres mails » à Montpellier. Louis XIV s’y adonna depuis l’enfance, sur le mail des Tuileries qu’il fit agrandir et sur celui de Saint-Germain-en-Laye. Voici ce qu’en dit l’Académie universelle des jeux, publiée à Amsterdam en 1786 :

    «Le jeu est propre à tous les âges, depuis l’enfance jusqu’à la vieillesse. On peut en même temps jouer, causer et se promener en agréable compagne. On y a plus de mouvements qu’à une promenade ordinaire. L’agitation qu’on se donne pour transporter la boule d’espace en espace fait un merveilleux effort pour la transpiration des humeurs & il n’y a point de rhumatismes ou d’autres mots semblables qu’on puisse prévenir ou guérir par ce jeu, la prendre avec modération, quand le beau temps & la commodité le permettent. Sa beauté ne consiste pas faire de grands coups, mais à jouer juste, avec propreté, sans trop de façons. Le corps ne doit être ni trop droit, ni trop courbé, mais médiocrement penché, afin qu’en frappant, il se soutienne par la force des reins, en le tournant doucement en arrière de la ceinture, en haut avec la tête sans toutefois perdre la boule de vue. C’est ce demi-tour du corps qu’on appelle jouer des reins, qui faisant faire un grand cercle au mail, fait l’effet de la force mouvante qui vient de loin. Si le mail est trop long ou trop pesant, on prend la terre ; s’il est trop court ou trop léger, il ne donne pas assez de force & l’on prend la boule par en dessus. Il importe donc chaque joueur de se choisir un mail qui lui convienne, dont il se rende le maître, & qu’il proportionne la boule à sa masse. Car il est bon de prendre garde à tout ».

    La balle est le plus souvent en buis, les meilleures balles étant celles en bois de néflier. Sur la promenade du grand rempart de la Croix-Rousse avait été organisé un parcours, sablé et bordé d’arbres, long d’environ cent cinquante mètres, dont la rue qui nous occupe conserve le souvenir. C’est dans cette rue que siégea, en 1848, le club de la Croix-Rousse.

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  • Bourbonnais

    get.jpgCette rue et ses environs sont habités depuis des temps fort reculés puisqu’à l’occasion d’un chantier au n° 105, on y a retrouvé il y a quelques années des vestiges importants d’une villa gallo romaine qui disposait de thermes privés. Tout le quartier de Vaise était alors une zone rurale proche de Lugdunum, sur laquelle de riches propriétaires faisaient construire leurs villas de campagne.

     

    Le chemin du Bourbonnais, ainsi nommé puisqu’il reliait le faubourg de Vaise à l’ancienne province du Bourbonnais, à la  limite Nord du Massif Central, est fort ancien. Grâce à la production des Pépinières Royales de Gorge de Loup, qui travaillaient à plein rendement, il était jadis bordé de sycomores. Entre 1874 et 1875, la ville acheta des parcelles de terrain à divers propriétaires afin de le transformer en artère. L’appellation  rue du Bourbonnais rappelle aussi le temps où la voie ferrée de Lyon à Paris par Moulins passait par Vaise.

    Le Bourbonnais, qu’avait créé puis agrandi la famille des Bourbons, avait été un duché de 1327 jusqu’à 1527, lorsque objettrouves.jpgFrançois 1er le réunit aux territoires de la Couronne. Depuis la Révolution Française, cette vieille province correspond à peu de chose près au département de l’Allier.  

    Depuis une dizaine d’années, la rue du Bourbonnais est aussi la rue des Objets Trouvés ; en effet, elle abrite ce service au n° 65.  Elle part du centre de Vaise, non loin  de la place Valmy, puis oblique à gauche au niveau de la rue de l’Oiselière pour  traverser tout l’arrondissement jusqu’à la pointe de la rue Marietton, au pied de la Duchère.

     

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  • Nuits

    1870 : L’année que Victor Hugo immortalise sous le vocable de terrible. Le 19 juillet, la France déclare la guerre à la Prusse. Le 12, Strasbourg est assiégé ; le 2 septembre, Napoléon III capitule à Sedan ; le 4, un gouvernement républicain voit le jour avec le général Trochu, Jules Favre et Gambetta ; le 19, Bismarck est à Paris ; Strasbourg capitule le 28 ; le 27 octobre, Bazaine rend les armes et en décembre, sous la conduite de Gambetta et de Garibaldi, la république poursuit les combats à Dijon. Le 18 décembre 1870, au pied de la ville de Nuits-Saint-Georges, les Allemands accrochent une armée de volontaires qui leur barrent la route vers le sud. Cette armée était composée de gardes nationaux mobiles originaires des Alpes-Maritimes, du Lyonnais et de Savoie, de corps-francs (Est et Sud-est de la France), de volontaires étrangers (polonais, hongrois, espagnols, américains et, surtout, italiens) : initialement moins de 4.000 hommes.

    Après une journée de combat, les corps-francs battirent en retraite : environ 1 200 prisonniers français, 97 officiers allemands abattus, un prince de Bade blessé, les pertes globales s'élevant à quelque centaines d’hommes. Les Prussiens achevaient les fuyards sur les routes du bourg, sauf les survivants mis à l’abri par la population, qui les revêtait de vêtements civils. Les vainqueurs pillèrent l'hôpital, les boutiques, les auberges, incendièrent, passèrent au crible la ville maison par maison. La nouvelle de la défaite parvint à Lyon, et une rumeur circula par la ville, affirmant que les troupes régulières avaient laissé massacrer les troupes volontaires (parmi lesquels de nombreux croix-roussiens) sans bouger. Les esprits s'échauffèrent; il y eut une grande agitation, un début d'émeute, durant lequel le Commandant Arnaud (voir ce billet) trouva la mort. En 1878, l'ancienne rue de la Visitation, dans le quatrième arrondissement, reçut le nom de cette bataille, en souvenir de ces nombreux morts.

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  • Deux-Amants

    La dénomination provient d’un tombeau, dit des Deux Amants, situé sur la propriété des sœurs de Sainte-Elisabeth, laquelle appartient à présent au conservatoire de musique, quai Chauveau. Elevé en forme d’autel entre les deux portes de Lyon et de Vaise, il fut détruit en 1707, car il menaçait de tomber en ruine. Tant de légendes circulèrent à propos de ce tombeau qu’on chercha, à l’occasion de sa démolition, si on ne pouvait rien découvrir, dans le terrain qui l’abritait, des traces susceptibles de confirmer l’une d’entre elles. La plus extraordinaire prétendant que ce tombeau serait celui du roi Hérode et de son épouse Hérodias, qui seraient venus finir leurs jours à Lyon, sur l'ordre de Caligula. C'est Flavius Josèphe, un historien juif d'expression grecque, né vers 37/38 et mort après 100, qui donna à cette légende une sorte de crédit historique dans son Histoire ancienne des Juifs, qui fut traduite en latin au VIème siècle : Caligula vient de convoquer, Hérode accusé d'avoir comploté contre lui :


    2135340410.jpg"Caligula était bouleversé et demanda à Hérode si ce qu'on disait des armes était vrai. Hérode répondit par l'affirmative sur l'existence des armes, car il lui était impossible de dire autre chose, sauf à contredire la vérité. Caligula pensant que les accusations de rébellion étaient fondées lui retira sa tétrarchie, qu'il ajouta au royaume d'Agrippa. Il condamna Hérode à un exil perpétuel, lui assignant comme résidence la ville de Lyon en Gaule. Ayant appris qu'Hérodiade était la sœur d'Agrippa, il lui rendit tous les biens qui lui appartenaient en propre et lui dit de penser que, si elle ne partageait pas le sort de son époux, elle le devait la protection de son frère. Mais elle répondit : Prince, tes paroles sont d'une âme élevée et conviennent à ta dignité. Mais l'amour que j'ai pour mon mari m'interdit de profiter de ce cadeau bienveillant. Il serait injuste, après avoir pris part à son bonheur, de l'abandonner dans le malheur.

    Mis en colère par cette grandeur d'âme, Caligula la fit exiler aussi, avec Hérode. Et il donna sa fortune à Agrippa. Tel fut le châtiment que Dieu infligea à Hérodiade pour la jalousie qu'elle portait son frère, et à Hérode pour avoir écouté des bavardages de femme."


    Venir mourir Lyon, châtiment divin infligé à Hérode pour avoir écouté Salomé et lui avoir offert la tête de Jean-Baptiste, voilà qui donne une piètre image de cette ville ! mais la fidélité d'Hérodiade rachète un peu l'affaire, en tous cas justifie la légende des deux amants.
    Depuis que « l'autoroute du soleil » traverse la ville, la rue des Deux-Amants, qui se trouve à l'entrée du tunnel de Fourvière dans le neuvième arrondissement, n'a plus de poétique que son nom. Dans certains cas, cela suffit.

  • Rue de la République

    De 1853 jusqu’en 1864, le département du Rhône eut pour maire et préfet Claude-Marius Vaisse, un serviteur zélé de Napoléon III, qui, « dans l’espoir de faire aimer la dictature, avait, dès son arrivée à Lyon, dressé un plan de travaux pour améliorer la circulation urbaine et faire pénétrer l’air et la lumière dans les quartiers sombres et humides du centre », écrit l’historien Kleinclausz[1]. Le fleuron de ces travaux fut sans conteste le percement de la rue Impériale, reconvertie, par la suite en rue de la République, large avenue «dont les beaux candélabres, les cafés somptueux, la fontaine aux eaux jaillissantes donnèrent aux bourgeois d’alors l’impression d’en finir enfin avec la vieille cité médiévale aux rues populaires, tortueuses et mal éclairées

    Ce point de vue rétrospectif, qui est celui de l’historien, est contesté par la vox populi, si l’on en croit ce témoignage du romancier  Henri Béraud, qui fut, dans son enfance, le témoin fasciné de l’ampleur de ces travaux :

    « Un quartier en démolition, ah ! mais tout un quartier, une entière paroisse, grande comme un chef-lieu de canton. Il n’en restait qu’un vaste éboulis. (…) Peu à peu, des maisons neuves s’alignaient sur les beaux vestiges du quartier Grolée. Il en résulta une avenue si large et si claire que les Lyonnais ne se décidèrent jamais à y passer ».[2]

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    Lyon modernisée ? Lyon vandalisée ? Le débat fit rage, opposants les tenants de la modernité hygiéniste aux vieux érudits du « Lyon de nos pères » Le préfet Vaisse fut accusé de construire ces larges avenues dans le but d’en finir avec les vieilles ruelles en zigzags, promptes à se changer en barricades. On l’accusa aussi d’aller contre le mouvement du soleil, en bâtissant sa rue de nord en sud,  et non pas d’est en ouest, et de fait, sa rue Impériale, même devenue rue de la République, est rarement inondée de soleil : de quoi donner raison aux nostalgiques de l’ancien Lyon, qui l’avait pronostiqué dès 1852 :

    «Et on appelle tout ce tumulte d’alignements inconnus, tous ces changements de décoration à vue, embellissement, assainissement, magnificence. Oui, l’air et la lumière inonderont la rue Impériale ; mais, dans nos villes méridionales, les rues larges offrent l’inconvénient d’être exposées sans défense aux bourrasques de l’arrière-saison et aux ardents soleils du soleil d’été. Ces grandes voies droites sont commodes, belles même, mais monotones et froides. Et à quel prix les obtenons-nous, au prix du caractère historique de la cité, des ses mœurs conservées, de son type, de son esprit public, de sa nationalité. Oui, encore un coup, la civilisation croulera à pleins bords dans cette rue ; mais je crains bien, moi, que la barbarie ne trouve, pour envahir la métropole lyonnaise, les mêmes facilités que la civilisation ; je crains bien que le charlatanisme, la rouerie, l’égoïsme de Paris ne fassent plus vite irruption, et n’achèvent de ruiner la physionomie locale »[3]


    Avec le temps, ces premières réticences se sont éclipsées et la rue de la Ré s’est installée dans le cœur des gens. Voici un beau témoignage de Jean Reverzy, tout imprégné des années cinquante :

    « A l’époque que nous évoquons, la jeunesse triste et humblement vêtue avait pris l’habitude d’arpenter la rue de la République à la fin de l’après-midi, les mains aux poches et un cahier de cours sous le bras. Nous allions par petits groupes, coude à coude, en causant à voix basse. La promenade sans but, d’un bout à l’autre de la rue, refaite dix fois, durait jusqu’au soir. Chaque visage rencontré était familier ; nous levions parfois les yeux sur une jeune fille, sans aller jusqu’à lui sourire : telles furent nos amours enfantines, dans un monde qui semblait et mourir d’ennui et de silence : cela s’appelait faire la rue de la Ré »[4]

     

    Faire la Rue de la Ré, ces mots-là, tous les Lyonnais les ont prononcés un jour. Pour y accéder, on prenait donc sa ligne O.T.L. (Office des transports lyonnais), le samedi après midi et l’on appelait cela « aller en ville » : aux Terreaux, par exemple, ou bien à Bellecour. Ou encore aux Cordeliers. Dans tous les cas, on faisait la rue de la Ré, véritable entreprise, dans un territoire conçu pour monsieur et pour madame, pour chacun et pour chacune : la presqu’île, dont la République et le monument érigé à son président assassiné était le centre, et dont la rue de la Ré était le nerf, a vraiment connu son heure de gloire dans les années cinquante/soixante. Durant la période dite « des fêtes », c’est-à-dire du huit décembre (qui ne durait alors qu’une soirée) à la Saint-Sylvestre, on s’y traînait en famille parmi des odeurs de brioches et de marrons chauds, dans la cohue de ses trottoirs parsemés de sapins enguirlandés, et les klaxons de sa chaussée qu’empruntaient les trolleys de la ligne 7 : Walt Disney était à l’affiche du Cinéjournal, John Wayne à celle du Majestic, Ben-Hur et Scarlett O’Hara à celle du Pathé : un véritable centre ville dans lequel le Pathé et le Progrès (aujourd’hui la Fnac), les brasseries (bar Américain, Tonneau, la Paix…), les sièges opulents des banques, les commerces et les grands magasins (Aux deux passages) distillaient savamment des ambiances citadines inoubliables.

    Depuis 1975, Avec la construction du centre commercial de la Part-Dieu, la Rue de la Ré a perdu ce caractère de centre ville exclusif. La construction, dans la foulée, du métro l’a rendue piétonne : Il est certain qu’à présent, entre la Fnac et les enseignes de restauration rapide, la Rue de la Ré, comme d’ailleurs beaucoup d’artères centrales de nos grandes villes, n’offre aux chalands cette poésie urbaine dont le texte de Reverzy se faisait écho. C’est une artère de consommation, de distribution.

    A l’image de la République, finalement…



    [1] Histoire de Lyon, tome III, librairie Pierre Masson, Lyon 1952

    [2] La Gerbe d’Or, Henri Béraud

    [3] Joseph Bard, « Bulletin d’archéologie locale » de la Revue du Lyonnais, 1852

    [4] A la Recherche d’un miroir Jean Reverzy, , Julliard, 1962,  réed. Flammarion 1001 pages, 2002

  • Algérie

    La colonisation de l'Algérie fut saluée à Lyon par l'appellation de la rue d'Algérie, qui relie la place des Terreaux (où trône l'Hôtel de Ville) au pont La Feuillée (qui traverse la Saône face au quartier Saint-Paul). Cette voie publique a très longtemps été désignée sous le nom de place des Carmes, en raison de la proximité du monastère des Carmes. Les Carmes s'étaient installés à Lyon en 1291. Pillé par les protestants en 1562, rénové en 1754-1758, leur couvent disparut corps et biens peu après la Révolution. Ce fut dans une salle de leur couvent que, le 12 janvier 1789, s'était tenue la première assemblée du Tiers-Etat lyonnais. L'église avait été bâtie au quinzième siècle, sur le modèle de Saint-Bonaventure.
    Le rue des Carmes avait pris plus tard le nom de la place de la Boucherie des Terreaux. Cette boucherie datait de 1539. Elle avait été construite par un maçon du nom de Laurent Guillaume, dit du Chessy. C'était un établissement considérable. Il occupait tout l'espace compris entre le quai et la rue Lanterne actuelle. En deux corps de bâtiments séparés par un passage livré au public, s'alignaient quarante tueries (car l'abattage des bêtes avait lieu dans la boucherie-même), surmontées de galeries et de séchoirs. Les troupeaux arrivaient à toute heure du jour. On était, vous l'imaginez, assez loin des normes européennes en vigueur à présent : le sang ruisselait dans les travées et une odeur infecte s'en dégageait. Cette boucherie, en plein centre ville et aux abords de la Saône, attirait quantité de rats. Quant aux bouchers, ils avaient la réputation d'être grossiers, ivrognes et vantards.

    Les bâtiments de la boucherie des Terreaux, incendiés en 1612, le furent à nouveau en 1734. Le Consulat céda alors le terrain qu'elle occupait aux Hospices Civils qui la fit reconstruire. La boucherie des Terreaux, comme les trois autres de la ville (Saint-Paul, Saint-Georges, Minimes) resta en exercice jusqu'à la création de l'abattoir de Perrache en 1840. Lorsqu'elle ferma, l'architecte Dardel (1796-1846) édifia à son emplacement un ilot d'immeubles bourgeois, qui demeura en état. On peut y voir de magnifiques façades et de magnifiques portes, même si la rue est très sale et dégradée de nos jours et si la perspective s'est trouvée abîmée par l'entrée du parking des Terreaux, qui casse complètement et inutilement sa perspective sur la place des Terreaux.. Au n°11, l'immeuble est orné par l'effigie de nombreux artistes, noircies de pollution et comme sourds au trafic des bus et des piétons. On y reconnait Delorme, Boissieu, Lemot, Blanchet, Coustou, Coysevox... Au n° 21, une façade récemment ravalée est d'une blancheur incongrue : sous la garde d'un diable, elle traboule d’une belle cour à la décoration orientale vers la rue Sainte Catherine.