Algérie
La colonisation de l'Algérie fut saluée à Lyon par l'appellation de la rue d'Algérie, qui relie la place des Terreaux (où trône l'Hôtel de Ville) au pont La Feuillée (qui traverse la Saône face au quartier Saint-Paul). Cette voie publique a très longtemps été désignée sous le nom de place des Carmes, en raison de la proximité du monastère des Carmes. Les Carmes s'étaient installés à Lyon en 1291. Pillé par les protestants en 1562, rénové en 1754-1758, leur couvent disparut corps et biens peu après la Révolution. Ce fut dans une salle de leur couvent que, le 12 janvier 1789, s'était tenue la première assemblée du Tiers-Etat lyonnais. L'église avait été bâtie au quinzième siècle, sur le modèle de Saint-Bonaventure.
Le rue des Carmes avait pris plus tard le nom de la place de la Boucherie des Terreaux. Cette boucherie datait de 1539. Elle avait été construite par un maçon du nom de Laurent Guillaume, dit du Chessy. C'était un établissement considérable. Il occupait tout l'espace compris entre le quai et la rue Lanterne actuelle. En deux corps de bâtiments séparés par un passage livré au public, s'alignaient quarante tueries (car l'abattage des bêtes avait lieu dans la boucherie-même), surmontées de galeries et de séchoirs. Les troupeaux arrivaient à toute heure du jour. On était, vous l'imaginez, assez loin des normes européennes en vigueur à présent : le sang ruisselait dans les travées et une odeur infecte s'en dégageait. Cette boucherie, en plein centre ville et aux abords de la Saône, attirait quantité de rats. Quant aux bouchers, ils avaient la réputation d'être grossiers, ivrognes et vantards.
Les bâtiments de la boucherie des Terreaux, incendiés en 1612, le furent à nouveau en 1734. Le Consulat céda alors le terrain qu'elle occupait aux Hospices Civils qui la fit reconstruire. La boucherie des Terreaux, comme les trois autres de la ville (Saint-Paul, Saint-Georges, Minimes) resta en exercice jusqu'à la création de l'abattoir de Perrache en 1840. Lorsqu'elle ferma, l'architecte Dardel (1796-1846) édifia à son emplacement un ilot d'immeubles bourgeois, qui demeura en état. On peut y voir de magnifiques façades et de magnifiques portes, même si la rue est très sale et dégradée de nos jours et si la perspective s'est trouvée abîmée par l'entrée du parking des Terreaux, qui casse complètement et inutilement sa perspective sur la place des Terreaux.. Au n°11, l'immeuble est orné par l'effigie de nombreux artistes, noircies de pollution et comme sourds au trafic des bus et des piétons. On y reconnait Delorme, Boissieu, Lemot, Blanchet, Coustou, Coysevox... Au n° 21, une façade récemment ravalée est d'une blancheur incongrue : sous la garde d'un diable, elle traboule d’une belle cour à la décoration orientale vers la rue Sainte Catherine.