Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

sadi carnot

  • Gailleton (quai et place)

    Antoine Gailleton, qui fut le premier maire de Lyon élu sous le nouveau régime municipal, aimait à rappeler qu’il était né entre deux arrondissements de Lyon, sa mère l’ayant mis au monde sur l’ancien pont de Change, le 17 novembre 1829. Son père, Claude, était tisseur et sa mère marchande d'oranges, précisément sur ce pont du Change, à présent détruit. Le jeune Gailleton grandit montée Saint-Barthélémy et se révèle très vite un brillant élève : à tout juste vingt ans, il est classé troisième au concours de l’Internat des Hospices de Lyon. Il exerce en tant qu’interne à l’Antiquaille, la Charité, l’Hôtel-Dieu, et devient chirurgien-major à l’Antiquaille. La chose publique l’intéresse assez tôt : le 15 septembre 1870, il se retrouve élu conseiller du 2ème arrondissement dans la municipalité de Jacques Hénon. Aux élections municipales d’avril 1872, il conserve son siège auprès de son successeur, le maire Désiré Barodet. Alors que la mairie centrale est à nouveau supprimée en 1874 par un pouvoir central qui craint toujours Lyon la Rebelle, il demeure président du Conseil Municipal sous la houlette du préfet. C'est alors qu'il entreprend un bras de fer avec les dix préfets qui se succèdent jusqu’en 1881, date à laquelle la mairie centrale est rétablie, à condition que le maire de Lyon soit nommé par le gouvernement, qui avec prudence le confirme dans ses fonctions.

     

    Le soir de juin 1984 où le président Carnot fut assassiné, Gailleton était assis en face de lui. Le président de la République avait proposé de faire à pied le court trajet qui séparait la Chambre du Commerce du Grand Théâtre. Gailleton l’en avait dissuadé au nom du protocole ; mais ses adversaires ne se privèrent pas d’affirmer que c’était à cause de ses rhumatismes : Sadi Carnot aurait-il échappé à la mort ? D’après Caserio, c’est possible, puisque qu’il déclara avoir prémédité son geste d’après la position protocolaire de sa victime dans la calèche officielle. Après l’attentat, Gailleton se retrouva au première loge pour conduire son hôte officiel blessé à mort à la préfecture où, avec le docteur Poncet, il tente sans anesthésie une opération de la dernière chance. Il veille sur le mourant dans les salons de la préfecture en compagnie du cardinal de Lyon,  jusqu’à minuit quarante deux, heure à laquelle Sadi Carnot rend le dernier soupir.

    On doit à Antoine Gailleton le dégagement des quartiers Saint-Paul et Martinière, la construction des ponts d’Ainay, de la Boucle, Morand et de l’Université, celle des nouvelles facultés, l’installation spectaculaire de la fontaine Bartholdi aux Terreaux, initialement prévue pour Bordeaux, le développement des tramways.

    gailleton_antoine.jpg
    Portrait d'Antoine Gailleton, par J. Chambe, 2e moitié XIXe siècle
     

    Mais la grande affaire de son mandat reste la démolition et la reconstruction du quartier Grolée, qui souleva de vives passions. Affaire engagée par lui avec un optimisme excessif, et d’ailleurs fort mal engagée, puis mal conduite, alors qu’on chantait dans la rue :

    « La ville est désolée

      Qu’on abatte la rue Grolée »

    Le « bonhomme Gailleton », surnommé « pipa Gailleton » en raison de sa pipe en terre qu’il allumait entre deux morceaux de réglisse, au bout de dix-neuf ans de règne sur la ville s’était sans doute trop vite assurée de n’être jamais démis de sa fonction. Sa popularité était, il faut le dire, vive. Mais à partir de 1892, l’un de ses adjoints, Victor Augagneur, commença à militer contre lui et finit par lui souffler le fauteuil en 1900. Impassible, Gailleton reprit du service à l’Antiquaille, ainsi que son enseignement fort discret.

    Le docteur Gailleton mourut le 9 octobre 1904. En 1907, un buste fut inauguré sur sa tombe à Loyasse, et la ville de Lyon donna son nom au quai de la Charité et à la place Grollier, dans le deuxième arrondissement. C’est là que son « monument », un imposant édifice de pierres, fut érigé par les architectes Lucas et Marion en 1913, avec un bas-relief d’André Vermare.

    1_ph_1375-1_monument_gail.jpg
  • Palais de Justice

    Il y eut jadis une rue du Palais, ancienne rue des Fouettés, là même où les condamnés subissaient leurs châtiments. Cette rue disparut lors de l’édification d’un Palais de Justice digne de la deuxième ville du royaume de Louis Philippe. Voici comment le Nouveau Guide Pittoresque de l’Etranger à Lyon (1856) salue l’apparition de ce bâtiment flambant neuf, aux côtés du chevet médiéval de la primatiale Saint-Jean Baptiste : «Notre ville s’est enrichie d’un nouveau monument, destiné à remplir un vide qui existait dans l’ensemble de ses édifices, non pas seulement sous le rapport de sa destination, mais encore sous le rapport architectural : le style grec, en effet, ne figurait dans aucune œuvre complète et digne de ce nom. Cette lacune, le nouveau palais de Justice construit par M Balthard vient de la combler. »

     

    Depuis 1995, la roue a tourné et ce nouveau Palais de Justice est devenu à son tour l’ancien, ou plus précisément le Palais Historique, tandis que la plupart des affaires se traitent dans un nouveau qui a pris place au 183 de la rue de Créqui, dans le troisième arrondissement de Lyon. Sa façade se compose d’une colonnade corinthienne portée par un soubassement en pierres de taille de 3 mètres cinquante, et qu’ont rendue célèbre - depuis notamment le procès de Santo Caserio, l’assassin de Sadi Carnot (août 1884), et plus près de nous celui de Klaus Barbie (mai juillet 1987)- ses vingt quatre colonnes en pierres de Villebois

     
    Le précieux dictionnaire Brun et Valette rappelle que, de temps immémorial, on a rendu la justice en cet endroit, où s’élevait le Palais de Roanne, flanqué de la prison. C’est dans la salle des audiences criminelles de l’ancien palais de Roanne que se déroula, à partir du 12 septembre 1642, le procès du marquis de Cinq-Mars qui fut condamné à mort avec son ami et associé le conseiller au Parlement de Paris De Thou, pour conjuration contre le Roi et son premier ministre le Cardinal de Richelieu. Pendant la Terreur (1793-1794), la prison de Roanne ne désemplit pas et retint prisonniers un grand nombre de suspects jugés par le Tribunal Révolutionnaire, à l’issue d’un bref interrogatoire. Plusieurs milliers furent condamnés à être guillotinés place des Terreaux ou fusillés collectivement sur la plaine des Brotteaux.

    Dans ses Embellissements de Lyon, l’avocat Pérouse fait dire à un homme du peuple cette strophe à propos du Palais :

    « Le voilà donc fini, ce palais de chicane
    Il n’est guère plus gai que le Palais de Roanne
    Malgré son prix énorme, on le décrit d’un trait :
    Façade ambitieuse et plus ou moins correcte :
    A quoi bon, de Paris, mander cet architecte
    ? »

    canon400da_4419.jpg

     

    La photo ci-dessus date de 1931. On y voit Fourvière, « les 24 colonnes » ainsi que l’ancienne passerelle du Palais de Justice. L'actuelle rue du palais de Justice se compose du tronçon qui relie la rue Saint-Jean le quai, sur la droite du Palais.

  • Suchet (cours)

    Louis Gabriel Suchet, duc d'Albuféra, pair de France en 1814, naquit à Lyon, sur la paroisse Saint-Saturnin, le 2 mars 1772. Il fit ses études avec succès à l'Ile Barbe. Destiné à devenir, comme son père, un bon négociant en soieries, il préféra - en vrai et bon romantique - s'enrôler en 1791 dans la cavalerie de la garde nationale de la ville et y servit comme sous-lieutenant. Deux ans plus tard, Suchet était capitaine dans une compagnie franche d'Ardèche. AU siège de Toulon, il commandait un bataillon. Il suivit Buonaparte en Italie, assista aux glorieuses journées de Dego, Rivoli, Castiglione, Bassano, Arcole. Il fut nommé major général de l'armée d'Egypte. On le retrouve à Austerlitz, à Iéna...

    430440664.jpg«Si j'avais eu Suchet à la place de Grouchy, je n'aurais pas perdu Waterloo», aurait dit Napoléon, lui aussi emprisonné, mais à Sainte-Hélène : Ne pas perdre Waterloo, de la bouche même de son empereur ... Le plus bel hommage qu'il pût recevoir, en vérité...

    Ci-contre, son portrait, par Guérin, visible au musée national du château de Versailles et des Trianon.

     

    Suchet mourut le 9 janvier 1826, au château de Montredon, près de Marseille. On l'enterra au Père Lachaise, le 23 janvier 1826, dans le carré napoléonien de ce somptueux cimetière parisien. Il a laissé un manuscrit de ses mémoires : les campagnes en Espagne, qui furent publiés a Paris de 1829 à 1834. A Lyon, ce n'est pas une rue, mais un cours large et rectiligne, pour tout dire assez laid, qui porte son nom. Ce cours traverse la presqu'île dans le quartier fabriqué par l'ingénieur Perrache.

    Le cours Suchet se termine par la prison Saint-Paul, qui vient de déménager cette année.

    Il fut longtemps le lieu des exécutions matinales, devant la prison. Le 16 août 1894, Santo Casério fut guillotiné devant la prison, coupable d’avoir poignardé le président de la république Sadi Carnot.

    Ainsi s'achevèrent bien des légendes, par trop romantiques.

  • Président Carnot (rue)

    Le 24 juin 1894, le Président de la République Sadi Carnot est à Lyon où il est venu visité l'Exposition Universelle. En compagnie du maire de Lyon, le docteur Gailleton, et des généraux Voisin et Borjus, Sadi Carnot se rend dans un landau découvert au Grand-Théâtre pour assister à une représentation d'Andromaque. De la Bourse au Grand-Théâtre, les trottoirs sont noirs de monde. « La ville, écrit le romancier Henri Béraud dans ses souvenirs, était illuminé au moyen 1071259783.jpgde godets pleins de suifs. » Soudain, un jeune homme vêtu de gris fend la foule et plante un poignard dans la poitrine du président avant de s’enfuir. Comprenant très rapidement la gravité de la blessure, le docteur Gailleton détourne le landau présidentiel vers la préfecture. Atteint à la veine porte et au foie, Sadi Carnot, né à Limoges le 11 août 1837, élu président de la République le 3 décembre 1887 à la suite de la démission de Jules Grévy, décède à 0h 30, le 25 juin 1894, après une opération de la dernière chance pratiquée sans anesthésie à l’intérieur de la Préfecture. L’assassin est un jeune anarchiste italien de vingt quatre ans, Santo Jeronimo Caserio, venu de Sète où il était apprenti boulanger. Il affirme avoir agi seul.

    La mort de Sadi Carnot engendra une immense émotion dans tout le pays et fit la «une» de tous les suppléments illustrés. Cela donna lieu à un commerce important de portraits, reproductions, biographies, statuettes, médailles et biographies du président défunt. La nuit fut terrible pour les compatriotes de Caserio. « Il avait dit sans hésiter son nom, son pays. Cela s’était vite répandu. Les autorités n’eurent ni le temps, ni le moyen de contenir une populace ivre de cris, de colère et d’alcool, qui sans retard saccageait et pillait les cafés italiens, les plus beaux de la ville. Après quoi, cette foule cherchait partout de malheureux ouvriers qui ne demandaient qu’à être espagnols » raconte encore Henri Béraud dans ses souvenirs d'enfance.

    Après une instruction rondement menée en vingt-deux jours, le 3 août 1894, Caserio est condamné à mort. Il accueille sa condamnation en criant : « Vive la Révolution Sociale ». Casimir Perrier, le nouveau président ayant refusé son recours en grâce, Caserio est guillotiné à l’aube du 16 août 1894, à l’angle de la rue Smith et du cours Suchet, devant l’ancienne prison Saint-Paul.

    Pour perpétuer le souvenir de cet événement, Lyon possède donc une rue du Président Carnot, qui traverse le quartier Grolée dans le deuxième arrondissement, à ne pas confondre avec la place Carnot, dédiée elle à son grand père Lazare (1753-1823), dit « le Grand Carnot ».

    Tous deux reposent, par ailleurs, au Panthéon.

    Photo : Médaille populaire représentant l'attentat