Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

la duchère

  • La Duchère (boulevard)

    De la rue Marietton à l’avenue de Champagne, le boulevard de la Duchère traverse le quartier du même nom de part en part. Cette dénomination rappelle l’ancien château de la Duchère, qui fut un poste militaire important, illustré par la défense de Lyon en 1793 et le combat contre les Autrichiens en 1814.

    Le premier possesseur de ce château fut Bernard de Varcy de la Duchère, conseiller de la ville vers 1300. Ce château fut reconstruit à mi-coteau par François Clapisson au début du XVIIème siècle, avocat du Roi au piédestal de Lyon.  En 1600, Henri IV, qui  venait à Lyon épouser Marie de Médicis, coucha au château de la Duchère avant d’entrer dans sa ville par la Saône : on montra longtemps  une chambre dite de Henri IV. Au dessous du portrait du roi, on pouvait lire :

     

    Si du sculpteur l’art et la science

    Pouvaient, par un semblable trait

    Graver sa valeur et clémence,

    L’ouvrage serait tout parfait.

    .

    En 1619, on offrit, à la Duchère, une fête et une collation à Mme Christine de France, soeur de Louis XIII, lorsque cette princesse passa à Lyon pour se rendre à Turin, où elle allait épouser le prince héritier de Piémont. Cette malheureuse fille du Béarnais devait mourir misérablement par la vengeance de son époux.

    Au moment de la Révolution, le château appartenait à François Claude de Riverieulx du Gage

    A la fin des années 50, le maire Pradel choisit l’emplacement de la Duchère pour un vaste programme de cinq mille logements, dont il confia la réalisation à l’architecte François-Régis Cottin. La SERL (société d’équipement de la région lyonnaise) fut crée le 17 février 1957. Elle racheta les terrains nécessaires et les aménagea pour les constructeurs qui livrèrent les premiers immeubles en 1963. François René Cottin construisit une église, un château d’eau et la plupart des tours ou barres. Les Lyonnais de l’époque rechignèrent en voyant ces tours et les barres s’élever à l’ouest de leur ville, autour de rues de numéros (la 8ème, la 22ème)  baptisées à l’américaine selon le souhait de leur autocrate maire, et baptisèrent du sobriquet de « cages à poules » les logis qu’on leur proposait. Les premiers Duchérois furent ainsi soit des expulsés de la Croix-Rousse après le glissement de terrain de 1964, soit des ouvriers logés par la Rhodiacéta de Vaise. Les rapatriés d’Algérie y trouvèrent à leur tour refuge. En 1972, la construction de la Tour Panoramique, d’une hauteur de 101,85mètres achève de donner au nouveau quartier une allure moderne.

    DUCHERE.jpg

    La barre 220, détruite à l'explosif le 19 mai 2010

    Mais à  partir des années 90, le quartier vieillit mal, avec  trop fameuse « barre des mille », les problèmes d’insécurité et de délinquance. Les émeutes de « jeunes » dans la nuit du 2 au 3 novembre1997 après la mort de Fabrice Fernandez, dont la tante habitait le quartier, finissent de donner à ce quartier l’image d’un ghetto similaire à Vaulx. Une entreprise de réhabilitation/ communication politique est entreprise par le maire de Lyon (GPV). Deux barres au gigantisme dégradé sont abattues (barre 210 en 2005 et 220 en 2010) et plusieurs immeubles bas construits, avec des logements proposés à des tarifs aménagés pour inciter à l’achat.

    Selon les avis, le nom de la Duchère pourrait provenir de l’ancien propriétaire du domaine dont il a été question plus haut. Une autre étymologie fantaiste fut proposée par un certain M Péan et relayé par l’abbé Vachet dans son Dictionnaire des Rues : « Duchère, dénomination celtique, peu altérée, faite du cymrique du (noir), et de notre Karr (roche, pierre), est venue d'une constitution extérieure du sol effacée par le travail accumulé par les générations. »

  • Mouloudji

    La rue Mouloudji  vient de voir  le jour en même temps que la rue Edith Piaf, dans le quartier de la Duchère à Lyon. Curieusement, dans la concertation sur les nouvelles dénominations des rues à la Duchère (mars 2006), on trouve cette phrase pour justifier le choix : « Son père est kabyle et sa père bretonne catholique fondamentaliste. » Espère-t-on faire un chanteur de la Rue de Lappe un modèle d’intégration réussie, à l’heure du tout métissage ?  

    Le père de Mouloudji, algérien né à Sidi Aïch (l'orthographe Kabyle de son nom est Marsel Muluği) fut jeune pâtre, puis agriculteur avant de venir en France où il s’inscrivit, au Parti communiste. Il épousa en effet une jeune Bretonne, catholique traditionnaliste qui lui donne deux fils : André et Marcel (septembre 1922). Mais cette dernière est bientôt internée pour désordre mental et le père analphabète ne sait comment élever ses deux fils dont le premier est très 18818190_jpg-r_760_x-f_jpg-q_x-20070907_074214.jpgmalade. La chance de Mouloudji se nommera Jean-Louis Barrault. C'est lui qui lui ouvre les portes du Paris artisitique des années quarante.  En 1938, il figure dans le film Les Disparus de Saint-Agil de Christian-Jaque. Dans les cabarets en vogue, il chante Boris Vian (Le Déserteur) ou Jacques Prévert, interprète son rôle dans le film Eaux troubles de Henri Calef en 1949 et participe à Boule de Suif (Christian-Jaque, 1947) et Nous sommes tous des assassins (André Cayatte, 1952- cf. photo ci contre et affiche ci-dssous). Il obtient un premier grand succès dans la chanson grâce à son interprétation de La Complainte des infidèles, extraite du film La Maison Bonnadieu de Carlo Rim (1951). En 1958, il fait sa dernière apparition au cinéma dans Rafles sur la ville de Pierre Chenal et dans un film hispano-suédois, Deux hommes sont arrivés (Llegaron dos hombres).

    Avec Jacques Canetti aux « Trois Baudets » Mouloudji  se dirige vers le succès. Comme un p'tit coquelicot obtient le Grand Prix du disque 1953 et le Prix Charles-Cros en 1952 et 1953. Même succès, en 1954, avec Un jour tu verras, chanson extraite du film à sketches Secrets d'alcôve).

    En 1970, il est sur la scène du Théâtre de la Porte Saint-Martin dans la comédie musicale La Neige en été, aux côtés de Nicole Croisille et Régine. En 1976, il enregistre avec l'accordéoniste Marcel Azzola une anthologie du musette, Et ça tournait. En 1980 il sort un album Inconnus Inconnues et donne d'innombrables concerts dans tout le pays, dont les médias s'en font rarement l'écho. Fatigué, il consacre plus de temps à l'écriture et à la peinture, ses anciennes amours. On le retrouve sur scène en 1987 à l'Élysée Montmartre.

    Il publie ses souvenirs de jeunesse : Le Petit Invité chez Balland en 1989, La Fleur de l'âge chez Grasset en 1991, puis Le Coquelicot aux éditions de l'Archipel, en 1997.

    En 1992, une pleurésie lui enlève en partie sa voix. Cela ne l'empêche pas d'enregistrer un album qui ne verra cependant pas le jour. On l'entend, le 17 novembre 1993, chanter dans la carrière de la Sablière à Chateaubriant (Loire-Atlantique), où avaient été fusillés 27 communistes, dont le jeune Guy Môquet, le 22 octobre 1941.

    En mars 1994, il est invité au festival Chorus des Hauts-de-Seine en région parisienne. Puis, il donne un ultime récital près de Nancy en avril.

    Il s'éteint le 14 juin 1994. Il est enterré au cimetière du Père-Lachaise à Paris.

     

    7210977.jpg

     

     

  • Edith Piaf

    Une rue Edith Piaf à la Duchère ?

    On cherche en vain dans la biographie de la fameuse chanteuse un quelconque rapport entre elle et le neuvième arrondissement de Lyon. Mais c’est ainsi.

    Dans sa séance du 18 septembre 2006, deux années avant le triomphe de Marion Cotillard aux Oscars, le délibéré signé par Alain Touraine justifie la décision de cette création (en même temps que celle d’une allée) ainsi : "Edith Piaf (1915-1963) fut une chanteuse très populaire et reste aujourd’hui la chanteuse française la plus connue internationalement." En même temps que cette rue Edith Piaf sont créées la rue Victor MUHLSTEIN (1922-2003), un militant associatif du quartier, la rue MOULOUDJI (1922-1994) et la rue Arthur RIMBAUD.

    Non loin de là se trouvait déjà une rue Marcel Cerdan, là où la barre des 200 récemment dynamitée. La rue Edith Piaf relie désormais la plus ancienne rue Marcel Cerdan à la rue Mouloudji. Histoire de placer le nouveau quartier sous le signe de la chansonnette ? Ou le signe de l'amour é-ter-nel ?

    La rue Edith Piaf demeure en cours de construction. Ci-dessous, une photo prise il y a deux ans, de son emplacement (on voit au fond la tour panoramique). Fin des travaux prévus pour l'automne.

    04-19_2008.JPG
  • Abbé Pierre

    La place de l'abbé Pierre (Lyon 9ème) n'est pour l'instant qu'un vaste terrain vague, à l'occasion un joli champ de boue. Elle existe pourtant depuis le 24 mai 20007, par une décision du Conseil Municipal de Lyon qui prit la décision d'attribuer à la future place centrale du quartier en construction sur le Plateau de la Duchère, face au lycée La Martinière, le nom d'Henri Groues, (1912-2007), qui venait de mourir. Devraient se trouver sur cette place quelques logements sociaux, un centre commercial, une médiathèque. A son emplacement auparavant se trouvait l'une des barres de la Duchère dont la démolition a été largement médiatisée.

    On connait les étapes les plus marquantes de l'existence de ce fils de négociant en soie de la bonne bourgeoisie lyonnaise : Ordonné prêtre en 38, il a pris le nom d'abbé Pierre durant la Résistance, à laquelle il prend part dans les maquis du Vercors et de la Chartreuse. « Mes amis ! Au secours ! Une femme vient de geler cette nuit, à 3 heures, sur le trottoir du boulevard de Sébastopol, serrant sur elle le papier par lequel on l’avait expulsée, avant-hier. Chaque nuit, ils sont plus de deux mille, recroquevillés sous le gel, sans toit, sans pain, plus d’un presque nu... »

    L'hiver 54, la croisade pour les sans-logis, les compagnons d'Emmaus, l'appel radiophonique à Radio-Luxembourg, tout cela constitue la première légende que le Roland Barthes, des Mythologies (1957) immortalise en une célèbre abbe_pierre2.jpgphrase : « Le mythe de l'abbé Pierre dispose d'un atout précieux : la tête de l'abbé. C'est une belle tête, qui présente clairement tous les signes de l'apostolat : le regard bon, la coupe franciscaine, la barbe missionnaire, tout cela complété par la canadienne du prêtre-ouvrier et la canne du pèlerin. Ainsi sont réunis les chiffres de la légende et ceux de la modernité. »

    Grâce à Roland Barthes, l'abbé devient, et bien avant Coluche ou Zidane, entre la DS et Brigitte Bardot, un symbole vivant des temps présents.

    La popularité de l'abbé renait dans les années quatre-vingts, lorsque son combat contre la misère se trouve réactualisé par ceux qu'on appelle dorénavant les sans-domicile-fixe. Le désengagement de l'Etat, aussi bien sous un gouvernement de gauche que de droite, face à l'installation conjointe de la crise, des formes de la nouvelles pauvreté, et du neo libéralisme mondialisant confère à cette figure moderne et solitaire une sorte d'aura, seule capable de terrasser dans des medias fortement idéologisés celle du tennisman ou du footballeur à l'heure de la coupe de monde de 1998. Cette starification irrationnelle, reconnaissons à Henri Groues le mérite d'avoir su l'utiliser pour la bonne cause sans en jouer à des fins personnelles. L'histoire dira si c'est suffisant pour en faire un saint.

    Cela dit, on peut penser, comme Barthes d'ailleurs le disait dès 1957, qu'une telle légende est le symptôme d'une maladie épouvantable de notre monde :

    « Je m'inquiète d'une société qui consomme si avidement l'affiche de la charité, qu'elle en oublie de s'interroger sur ses conséquences, ses emplois et ses limites. J'en viens alors à me demander si la belle et touchante iconographie de l'abbé Pierre n'est pas l'alibi dont une bonne partie de la nation s'autorise, une fois de plus, pour substituer impunément les signes de la charité à la réalité de la justice ».

    L'Abbé Pierre figure sur la fresque des Lyonnais située non loin du quai Sant-Vincent, en compagnie de Paul Bocuse et de Frédéric Dard.