Observance
Au bord de la Saône, près du rocher de Pierre Scize, des religieux Cordeliers avaient fondé un cloître. Peu à peu, dit-on, la discipline s'y étaient relâchée fort. En 1493, le frère Bourgeois et le frère Tisserand, tous deux prédicateurs de renom, entreprirent donc de ramener les religieux - qu'on appelait les petits Cordeliers (ou Mineurs) pour les distinguer de ceux établis vers saint Bonaventure (Majeurs) - à une observation religieuse plus rigoureuse de la règle de saint François d'Assise. Dès cette régénération, la communauté prit le nom des Cordeliers de l'Observance; d'où la dénomination de cette voie publique. C'est sur ce terrain dépendant de ce cloitre que se trouvait le tombeau des Deux Amants. Martial d'Auvergne emprunta à ce fait un oeuvre fort curieuse intitulée L'Amant rendu cordelier, ou L'Observance d'amour.
L'église fut bâtie à l'emplacement de l'ancien hôpital des Deux-Amants, qui appartenait au chapitre Saint-Jean. Les religieux commencèrent à déblayer le terrain en 1492; et le 25 mars 1493, la première pierre fut posée par Charles VIII et Anne de Bretagne. Ronsard, dans l'Eloge de Charles VIII qui lui est attribué rappela ainsi cet événement :
Es faubourgs, pour les frères Mineurs
Il fonda un couvent ; puis avec grands seigneurs,
Princes, comtes, barons et bande qui frétille,
S'en alla conquérir Naples et la Sicile.
Une réputation douteuse poursuivit cependant ces frères mineurs. En date du 14 mars 1589, on trouve dans les registres du Consulat une autorisation faite aux religieux du couvent de l'Observance à entrer ou sortir de la ville à toutes les heures du jour, soit par terre, soit par eau « pourvu que dans la besche il n'y ait d'autres que des religieux et qu'il ne s'y commette aucun abus ».
La montée de l'Observance serpente en esses la colline de Fourvière, par le cimetière de Loyasse, à partir du quai Chauveau.
La nuit du 2 au 3 juillet 1975, peu après 2 heures du matin, une Ford claire se rangeait contre le trottoir de la montée de l’Observance. François Renaud était accompagnée d’une jeune femme, Geneviève M, dont il se détourna aussitôt afin qu’elle pût rejoindre le hall d’entrée de leur immeuble. Il s’en fallut d’un mètre pour que le juge Renaud n’échappât à ses poursuivants : les constatations ont montré qu’il avait tenté de sauter un petit mur derrière lesquels se trouvaient les jardins. C’était la première exécution d’un juge depuis la Libération. Le Garde des Sceaux de l’époque, Jean Lecanuet, promit solennellement que tout serait mis en œuvre pour retrouver les assassins.
Surnommé le Shérif, le juge Renaud était né en Indochine, où son père était médecin-colonel. Socialiste de cœur (il fut avec Charles Hernu l’un des fondateurs du club des Jacobins), ses amis le disaient tête brûlée, bosseur, beau parleur, buveur et ouvertement raciste. Il circulait dans une vieille BMW, toujours immatriculée en Saône et Loire. On se souvient qu’en 1977, Yves Boisset porta l’affaire à l’écran et que Patrick Dewaere brilla dans le rôle du juge.